Comment on préserve des espèces en danger d’extinction, ou éteintes
Le Centre botanique est timide. Il ne clame pas sur les toits le travail qu’il réalise pour la préservation du patrimoine génétique végétal de la planète. Certaines espèces présentes ici sont quasiment introuvables. « L’Aloé Pillansii est en voie d’extinction dans la nature. Nous sommes le seul centre botanique au monde à l’avoir en culture suffisamment âgée pour fleurir », affirme Frédérique Dumont, attachée technique au Jardin exotique.
Reproduction difficile…
Cette plante ressemble à un Aloé tel qu’on les connaît, mais juché sur un tronc de plusieurs mètres de haut. Le spécimen présent ici date de 1972, une époque où faire voyager les plantes était beaucoup plus facile. Depuis, la Convention de Washington est entrée en application. Et si elle protège considérablement les espèces végétales et animales, elle en complique aussi les échanges et le commerce. On pourrait se dire qu’avec un exemplaire adulte capable de fleurir et fructifier, on devrait parvenir à faire des petits. Mais voilà, c’est plus compliqué que cela. « Nous n’arrivons pas à faire de fruits. Et nous ne faisons pas de boutures. Comme il n’est pas autofertile, il faudrait un deuxième sujet. Ou aller en Namibie pour récolter du pollen. Nous l’avons envisagé à moment », explique Frédérique Dumont. Diane Ortolani complète: « Comme nous sommes un centre agréé, nous pourrions le faire, mais il faudrait faire toutes les démarches. Pour vous donner un ordre d’idée, ce serait aussi complexe que de ramener de la semence de panda. » Une complexité qui demande forcément plus de temps et plus de moyens.
... Ou contrôlée
Pour d’autres espèces, la reproduction est possible mais délicate: « Sur cet autre aloé, nous faisons de la pollinisation contrôlée. Nous couvrons les fleurs pour être sûr qu’il ne soit pas contaminé par un pollen d’une provenance inconnue. Ensuite, nous procédons nous-même à la pollinisation. Une fois que nous avons les fruits, nous produisons un index seminum et nous mettons les graines à disposition des autres centres botaniques », poursuit Diane Ortolani. Car en matière de conservation, ce n’est pas la compétition qui règne en maître. Ici l’intérêt est au contraire de multiplier les exemplaires de conservation, et de les disséminer dans d’autres centres à travers le monde, de sorte que si survenait une destruction accidentelle, le patrimoine soit protégé. « Certaines espèces présentes ici sont même éteintes dans la nature », d’après Frédérique Dumont. C’est le cas de la Mammillaria Carmenae, un petit cactus globuleux, qui est souvent encore répertorié sur les bases de données grand public comme en danger critique d’extinction. Le centre botanique de Monaco reçoit aussi des demandes de scientifiques du monde entier pour vérifier si certaines espèces prélevées dans la nature ont été correctement identifiées, ou pour faire des analyses génétiques. Un vrai travail de l’ombre pour permettre, comme souvent à Monaco, de protéger l’environnement.