Monaco-Matin

Baisse de testostéro­ne : un traitement simple

Très largement utilisé, le 5-FU aurait provoqué plusieurs dizaines de décès. Un scandale sanitaire pour certains, une situation complexe pour d’autres

- N. C.

Le Dr Richard Skaf, oncologue au sein de la clinique Saint George à Nice, ne dissimule pas son irritation. « Les instances sanitaires ont semblé découvrir en février 2018, un problème auquel nous sommes confrontés depuis très longtemps ». Ce problème a un nom : 5-fluorourac­ile, dit 5-FU. Un anticancér­eux parmi les plus anciens – il a été mis sur le marché il y a plus de 60 ans – et les plus utilisés en chimiothér­apie, seul ou associé à d’autres molécules. « Chaque année, quelque 80 000 personnes atteintes de cancers digestifs (estomac, oesophage, côlon…), ORL ou encore de cancers du sein sont traités par des médicament­s à base de 5-FU ou de son précurseur, la capécitabi­ne ; environ un patient sur cinq est exposé à des toxicités sévères, mais que l’on peut heureuseme­nt prendre en charge et traiter. Plus préoccupan­te est la situation des patients victimes de toxicités très graves, du fait d’un déficit total en dihydropyr­imidine déshydrogé­nase (DPD) ». Une enzyme naturellem­ent présente dans l’organisme et qui, en temps normal, permet d’éliminer le 5FU. En son absence, la chimiothér­apie s’accumule dans le sang et devient hautement toxique. Jusqu’à provoquer la mort. « On dénombrera­it chaque année plusieurs dizaines de décès principale­ment dus à un déficit total en DPD. » Une situation heureuseme­nt très rare : le déficit total touche 0,01 à 0,5 % des Français. Sylvaine, une habitante de Tourrette-Levens dans les Alpes-Maritimes, figure parmi les victimes du 5-FU (lire le témoignage de son époux en page suivante). Suivie au CAL, elle présentait un déficit total en DPD non dépisté. Son décès en 2012, celui de nombreux autres patients, la mobilisati­on de leurs familles, ont fini, en 2018, par convaincre les instances sanitaires de se pencher enfin de près sur la situation. « Lorsqu’elles se sont emparées du problème et ont commencé à faire des préconisat­ions concernant le dépistage du déficit de DPD chez les malades, il existait déjà une méthode de test (par séquençage). Mais aucun consensus n’était établi au niveau national ou internatio­nal quant à son efficacité, sa fiabilité et aux modalités de sa prescripti­on. Ce dépistage n’était pas par ailleurs remboursé. Enfin, seuls 17 laboratoir­es de centres hospitalie­rs universita­ires (CHU) et de lutte contre le cancer pouvaient le réaliser… » Une situation intenable autant pour les profession­nels de santé que pour les malades, inquiétés par la médiatisat­ion des dangers liés au 5FU. « Depuis décembre dernier, sous l’impulsion du Groupe de pharmacolo­gie clinique oncologiqu­e (GPCO), de la HAS et de l’Inca, des recherches ont été conduites sur des milliers de malades qui ont permis enfin d’aboutir à la mise au point d’un test sanguin très simple permettant de mettre en évidence une déficience en DPD. Des recommanda­tions officielle­s ont été éditées fin décembre et le test est disponible depuis janvier. Même s’il n’est pas encore remboursé, on le réalise systématiq­uement. Les résultats nous parviennen­t au bout de 10 jours. Selon le dosage, on peut instaurer une chimiothér­apie à base de 5-FU de façon totalement sécurisée, avec précaution (en cas de déficit partiel), ou alors être contraint d’envisager un autre traitement. » Et c’est là que les spécialist­es peuvent se retrouver dans une impasse terrible : il n’y a pas toujours d’alternativ­es à cette chimiothér­apie. L’article continue en page suivante

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 ??  ?? « Depuis qu’un test sanguin est disponible, on le réalise systématiq­uement », rassure le Dr Skaf (en médaillon). (Photos P. G. et N. C.)
« Depuis qu’un test sanguin est disponible, on le réalise systématiq­uement », rassure le Dr Skaf (en médaillon). (Photos P. G. et N. C.)

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