Trois « gilets jaunes » condamnés à de la prison
Interpellés le 15 décembre au rond-point de Provence à Antibes et poursuivis notamment pour « violences, outrage et rébellion », Magali, Kris et Lionel ont écopé de 2 à 5 mois de prison
Trois « gilets jaunes » étaient convoqués, lundi, devant le tribunal correctionnel de Grasse : Magali 40 ans, une Antiboise à la santé fragile, Kris un Antibois de 39 ans vêtu – peut-être pour la circonstance – d’une chemise unie d’un jaune éclatant et enfin Lionel un Marseillais de 40 ans.
Placés sous contrôle judiciaire le 17 décembre, ils ont participé tous les trois à un rassemblement le 15 décembre autour du rond-point de Provence à Antibes, longtemps occupé par les « gilets jaunes ». Appréhendés dans des circonstances différentes et n’ayant aucun lien particulier entre eux, ils étaient poursuivis pour « violences, outrage, rébellion et participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences contre des personnes ou des biens ».
« Je n’étais là que pour filmer les événements »
Le président du tribunal Pierre Kuentz décrit le contexte dans lequel ses individus ont opéré, chacun à leur manière et avec les convictions et les engagements qui sont les leurs dans ce mouvement populaire.
Bien que se prévalant de n’être encarté dans aucun parti politique, Kris, l’homme à la chemise jaune se défend : « Je n’étais là que pour filmer les événements, les forces de police. J’avais fait précédemment des vidéos où tout se passait bien, je suis même intervenu pour calmer des situations tendues, je suis un simple observateur. » Il se dit, lui-même, victime : « J’ai été délibérément ciblé et on a brisé ma caméra à coups de matraque (il la tenait au bout d’une perche), et j’ai reçu un coup sur la main qui m’a brisé plusieurs phalanges nécessitant 45 jours d’ITT. » Et ce dernier d’ajouter : « J’ai répondu à la violence par l’insulte, je le reconnais, mais on m’a donné 2 Doliprane en 40 heures de garde à vue pour calmer ma douleur alors que ma main gonflait à vue d’oeil. »On lui reproche d’avoir crié : « Ta mère la pu…, pourquoi tu m’as fait ça ! » Veilleur de nuit, il a alterné 21 CDD successifs, avec une mention à son casier judiciaire, c’est un bon père de famille, très investi dans la vie associative et sportive comme le soulignera son avocat Me Delphine Gillet.
Le cas de Magali est bien différent puisqu’elle s’est retrouvée une nouvelle fois appréhendée comme trois semaines auparavant. Elle avait trouvé dans le soutien aux « gilets jaunes » une raison de s’affirmer et de participer à ce qui selon elle « donnait un sens à sa vie ». Mais prise de suffocations à cause d’une allergie au lacrymo, elle sera conduite aux urgences de La Fontonne. Menottée dans le fourgon, elle a craché en direction d’une policière de l’escorte, en l’injuriant. La victime a témoigné à la barre. Et l’avocat de la partie civile de relever : « Elle est devenue hystérique lorsqu’on lui demande de donner son téléphone. »
Aux intérêts de sa cliente Me Dominique Guidon-Charbit a dénoncé « les conditions épouvantables de sa détention. On ne l’a pas autorisé à se rendre dans des toilettes plus convenables que celles proposées aux gardés à vue, ni proposé à manger. Et surtout à aucun moment on l’entend dire sur son téléphone alors en action : salo…, sale flic » Une plainte sera d’ailleurs déposée à la gendarmerie.
, g d’alcool
Le troisième « gilet jaune », Lionel, à l’allure de « zadiste » selon les termes du PV qui le décrit aurait agi pour faire dégénérer une situation alors particulièrement explosive. Il se laissera appréhender sans résistance avec 0,52 gr d’alcool par litre d’air expiré.
« Ce n’est pas un taux énorme »,se défendra Lionel, marié, père de trois enfants. Son avocat Me Philippe Boufflers déclare : « C’est un véritable « gilet jaune », on ne le juge pas sur son passé » faisant allusion à son casier judiciaire. Et d’ajouter : « Ils l’ont interpellé à titre préventif. »
Le procureur de la République Marie-Nina Valli les interpelle tous trois en déclarant : « Vous vous instituez comme les dépositaires de la morale et vous vous arrogez le droit de décider comment appliquer le code de procédure pénal. » Elle requiert entre 4 et 9 mois de prison et une amende de 2000 à 4 000 euros.
Le tribunal condamnera Magali à 5 mois de prison, Kris à 5 mois avec inscription au casier judiciaire B2 et Lionel à 2 mois. Ces peines sont aménageables. Ils seront convoqués devant le juge d’application des peines qui décidera de la manière dont elles seront effectuées.