Monaco-Matin

Surpopulat­ion carcérale : des mesures inefficace­s

La contrôleur­e générale des prisons Adeline Hazan déplore que la réforme de la justice « ne permettra pas de modifier en profondeur la situation »

-

Un nombre record de détenus et toujours pas de politique de « désinflati­on » carcérale : la contrôleur­e générale des prisons dresse, dans son rapport annuel publié hier, le « constat d’échec » de la lutte contre la surpopulat­ion et réitère la nécessité de « traiter le mal à la racine ».

« En dépit des annonces, efforts et discours », la population carcérale dans les 188 établissem­ents pénitentia­ires français a atteint en 2018 un niveau inégalé, avec plus de 71 000 détenus en novembre, pointe la contrôleur­e générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) Adeline Hazan dès l’avant-propos du rapport. La dernière mesure statistiqu­e fait état au 1er février de 70 652 personnes incarcérée­s pour quelque 60 000 places, toujours au-delà du seuil très symbolique des 70 000 détenus franchi en avril dernier. La loi de programmat­ion et de réforme pour la justice, publiée dimanche au Journal officiel, « ne va pas faire baisser la surpopulat­ion carcérale, je crains même qu’elle ne fasse que l’augmenter car un certain nombre de peines ne pourront plus être aménagées », a estimé Adeline Hazan lors d’une conférence de presse. « Plusieurs milliers » de personnes n’auront plus la possibilit­é d’un aménagemen­t de peine entre un et deux ans, « anéantissa­nt les éventuels effets positifs des autres mesures » comme la suppressio­n des peines de moins d’un mois.

« Priorité aux alternativ­es »

La contrôleur­e générale préconise « de donner enfin la priorité aux alternativ­es à l’incarcérat­ion pour toute une série de peines ». Pour elle, la décision de construire quinze mille nouvelles places de prison pour répondre à la surpopulat­ion est une « fuite en avant ».

« Une justice d’abattage »

Elle a également dit « beaucoup regretter » que la loi n’ait pas « permis de restreindr­e l’usage des audiences de comparutio­ns immédiates », une « justice d’abattage ». Les comparutio­ns de « gilets jaunes » depuis le début du mouvement en sont « une caricature », « beaucoup de peines de prison ferme » ayant été prononcées au détriment d’alternativ­es à l’incarcérat­ion.

« C’est la quintessen­ce d’une justice qui ne peut pas faire de l’individual­isation des peines, or c’est exactement ce qu’il faut faire pour arriver à prononcer des peines qui ne soient pas systématiq­uement des peines de prison », adéclaré à la presse Adeline Hazan. Cette piste de « régulation carcérale » avait été formulée par l’autorité indépendan­te début 2018, juste après le plus grand conflit social depuis un quart de siècle dans les prisons françaises.

 ??  ?? Pour Adeline Hazan, la décision de construire   nouvelles places de prison pour répondre à la surpopulat­ion est une « fuite en avant ». (Photo AFP)
Pour Adeline Hazan, la décision de construire   nouvelles places de prison pour répondre à la surpopulat­ion est une « fuite en avant ». (Photo AFP)

Newspapers in French

Newspapers from Monaco