AS Monaco : la parole aux anciens
Oui, Limoges est un club de légende. Mais l’ASM, aussi, possède un riche passé. Témoignages...
Pour évoquer le passé, rendez-vous a été donné au Club bouliste du Rocher, qui domine toute la Principauté. Robert Zuttion, 70 ans, le surdoué qui dribblait au ras du sol, meneur international de l’ASM de 1974 à 1986, Edgar Berti, 75 ans, le seul vrai Monégasque, arrière et coach marquant de 1956 à 1978, et Henri Zenati, 76 ans, ailier de 1965 à 1976, puis directeur à IBM, ont toujours la forme et pas que sur le clos. « On fait encore des matches de basket contre les anciens de 50 ans et il nous arrive de gagner », sourit Zenati. Chez ces trois amis, comme pour beaucoup qui ont fait la longue histoire de l’ASM Basket, la passion est intacte. Vendredi, face au CSP Limoges, en 1/4 de finale des playoffs, ils seront à Gaston-Médecin, comme à pratiquement tous les matches.
« La Roca Team peut sortir le grand jeu, on est confiants »,
glisse Zuttion, président du Menton BC. Si le CSP est une légende (11 fois champion de France), si l’histoire du basket sur le Rocher n’a pas le même palmarès, elle n’en reste pas moins riche et passionnante. Berti remonte le fil du temps : dans les années 50, le terrain de basket de l’ASM se situait à l’air libre, derrière les buts de l’ancien stade Louis-II, en contrebas de l’ancien zoo. « C’était de la terre battue. Puis, il a été goudronné, ce qui ne plaisait pas aux footeux, qui craignaient de glisser avec les crampons ».
Princesse Grace
Au milieu des années 60, l’ASM Basket remonte en N2. « Le terrain à l’air libre n’était plus homologué. On a déménagé aux Moneghetti ». La petite salle de Beausoleil, célèbe pour ses gradins en bois tranformés en caisse de résonance, devient un lieu de rendez-vous à succès. C’est aux Moneghetti que l’ASM devient championne de France de N2 en 73, avec la montée en N1 (l’élite), sous les yeux de la famille Princière.
« La Princesse Grace et le Prince Rainier venaient souvent au match, avec les enfants, Caroline, Albert et Stéphanie. Ils étaient installés deux rangs derrière le banc de l’équipe », glisse Henri Zenati. Une particularité : « La salle étant à Beausoleil, la police française devait assurer la sécurité ».
Dès sa première saison l’ASM Basket termine 4e de N1 en 1974 et joue sa première Coupe d’Europe (la Korac) aux Moneghetti !
francs le succès
Puis, le Palais fait ériger une salle à Fontvieille, aujourd’hui disparue. La fameuse ‘’bulle’’ aux néons crayeux et au revêtement synthétique de couleur verte. On est en 75, Zuttion est arrivé l’année précédente, lui dont la réputation a largement dépassé les frontières de Temple-sur-Lot, où il a été champion de France cadets. « A la place du quartier actuel de Fontvieille, il y avait un grand terrain vague, et au bout, la salle », se souvient Robert. L’ASM s’installe dans l’élite, avec plusieurs saisons en Korac. Les derbys avec Nice et Antibes déclenchent de l’électricité. « Robert (Zuttion) était le seul à avoir trouvé la façon de défendre sur Dan Rodriguez, le meneur d’Antibes », glisse Zenati. A l’époque, on a droit à deux étrangers, et le choix des deux ‘’Ricains’’ (Américains) était capital. « L’un des meilleurs que l’on ait eu, Gary Suiter, était aussi complètement fou. Il s’amusait à faire la circulation devant le casino ».
A l’époque, le basket conduisait rarement au jackpot. « Monaco ne faisait pas partie des gros budgets. Mais le président Quenin, quand on a accédé à la N1, nous a fait voyager quelques saisons dans un petit Cessna. René Guerin (le shooteur venu d’Antibes) a toujours refusé de monter ! ». Seuls les Américains etaient des pros.
« On travaillait tous à côté, disent les trois. On avait négocié la prime de victoire à 1000 francs (environ 150 euros), et elle doublait à chaque fois si on enchaînait les victoires. Au bout de 3 ou 4 victoires d’affilée, le président Quenin commençait à la trouver mauvaise !».
Cataclysme
L’ASM Basket restera à Fontvieille jusqu’en 1985, année de l’inauguration du stade Louis-II et de la salle actuelle intra-muros, Gaston-Médecin. Autour de la légende Robert Smith, quelques stars du basket français viendront grossir les rangs, comme Eric Beugnot, Philippe Szanyiel… L’ASM Basket terminera même 2e de ProA derrière le grand Limoges en 1988, mais échouera en play-off à cause de l’appendicite de Robert Smith. Puis, en 1991, le cataclysme : mal en point financièrement, le club pro est dissout, l’ASM Basket rayée de la carte. « La faute à des dirigeants incompétents, il faut le dire », tranche Zuttion. L’ASM, avec ses dévoués bénévoles, repartira courageusement dans les championnats amateurs. Avant l’arrivée d’un mécène ukrainien passionné de basket, Sergei Dyadechko, qui a tout changé et relancé le basket asémiste tout en haut de la vitrine du Rocher.