Monaco-Matin

Comment extraire un pilote sans lui infliger des lésions ?

Hier devant les stands de l’écurie Ferrari, les sapeurs-pompiers de Monaco ont effectué un exercice d’extraction devant un médecin de la FIA. Une démonstrat­ion rondement menée

- THIBAUT PARAT tparat@nicematin.fr

Les écuries s’en passeraien­t volontiers. Mais c’est une obligation de la toute-puissante FIA. À chaque Grand Prix, pour chaque course (*), les équipes d’extraction doivent se plier à un exercice, la veille des premiers essais libres. Et, cette année à Monaco, c’est Ferrari qui s’y colle, tirage au sort oblige. Pour la deuxième année consécutiv­e. En pleins réglages des montures de Charles Leclerc et Sebastian Vettel, les mécanicien­s de l’écurie au cheval cabré ont, donc, sorti des boxes la monoplace du Monégasque pour que les sapeurspom­piers de Monaco s’exercent dessus. L’oeil inquiet à l’idée qu’un pan de la carrosseri­e soit abîmé par un geste mal maîtrisé. Puis, vite rassurés par l’interventi­on profession­nelle et bien ficelée des soldats du feu monégasque­s.

Des gants isolants

Et ce n’est pas le chouchou local qui a joué les pilotes à extraire mais un mécanicien de la firme italienne. Le scénario est bien rodé : un spectacula­ire crash survient sur l’asphalte. Le pilote, bloqué dans le baquet, ne peut s’exfiltrer lui-même. Il faut intervenir. Premier détail qui alerte notre attention : le port de gants rouges. « Ils sont isolants jusqu’à 1 000 Volts. Les voitures sont hybrides avec un moteur thermique et une partie électrique. On peut donc avoir un véhicule en défaut », explique le sergent-chef Franck Lanteri, responsabl­e des équipes d’extraction des sapeurs-pompiers de Monaco. Voyant vert ? Tout danger est écarté. Voyant rouge ? La voiture annonce un défaut, la précaution est de mise. « La tension est, certes, beaucoup moins élevée qu’en Formule E mais on fait attention. Du personnel a déjà pris des décharges mais ce n’est pas mortel », rassure-t-il. Chronométr­é pour l’occasion par un médecin de la FIA, le quintuor des pompiers ne perd pas une seconde. Chaque geste est minutieux, réfléchi. Il faut d’abord retirer le volant, la protection latérale qui évite au pilote d’être bringuebal­é dans les virages, son support de tête et de cou. Et, bien sûr, le casque. « On lui pose alors un collier cervical, on lui enlève sa ceinture et on le sangle pour le sortir avec son siège extractibl­e, détaille Franck Lanteri. Une fois allongé, on le transporte sur un matelas coquille qui épouse la forme de son corps. C’est une sorte d’attelle géante. »

« Que les choses soient bien faites »

Une manipulati­on rondement menée en 5 minutes et 24 secondes. Bien en deçà du cap des sept minutes, jadis exigé par la FIA. « On est revenu sur ce temps. Ce n’est plus une importance d’être à la seconde près. On préfère que les choses soient bien faites, qu’il n’y ait pas de lésions sur le pilote, assure le Dr Alain Chantegret, délégué médical permanent de la FIA en Formule 1. Une voiture qui percute un mur à 300 km/h peut en créer beaucoup. En direction de course, à chaque accident, on a le nombre de G qui s’affiche. Au-dessus de 15G, on considère qu’il faut examiner le pilote. Les risques sont le traumatism­e crânien mais aussi des fractures de vertèbres, notamment en bas du dos. C’est pour cela qu’on utilise ce système de siège extractibl­e pour sortir un pilote sans le rendre tétraplégi­que ou paraplégiq­ue. »

En 1989, dans des conditions bien différente­s d’aujourd’hui, Philippe L’importance capitale de cet exercice : ne pas brusquer le pilote en faisant

Streiff deviendra tétraplégi­que à la suite d’une succession de mauvais gestes au Brésil (lire ci-dessous). Là, pour cette simulation grandeur nature, le médecin s’est assuré que la tête du pilote ne valdinguai­t pas. Mission réussie, donc, pour les sapeurs-pompiers de Monaco qui, en fin d’exercice, ont pu présenter leur bâche isolante tout à fait unique. Une démonstrat­ion déjà effectuée lors de l’exercice d’extraction sur une Formule électrique. * En l’occurrence F1, Formule 2, Formule Renault, Porsche Mobil 1 Supercup. bouger sa tête et ses cervicales.

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(Photos Jean-François Ottonello)
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La monoplace de Charles Leclerc sous étroite surveillan­ce des hommes en rouge de Ferrari. D’autant plus à la veille des premiers essais libres.
 ??  ?? Charles Leclerc a effectué un petit tour dans le box de son écurie pour jeter un oeil furtif à l’extraction en cours sur sa voiture.
Charles Leclerc a effectué un petit tour dans le box de son écurie pour jeter un oeil furtif à l’extraction en cours sur sa voiture.
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