Monaco-Matin

Broyée par le Brexit Theresa May démissionn­e

Après l’échec de sa dernière propositio­n, la Première ministre britanniqu­e a annoncé hier qu’elle quitterait ses fonctions le 7 juin. Son départ renforce la probabilit­é d’une sortie de l’UE sans accord

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Un aveu d’échec. Après avoir tout tenté pour résoudre le casse-tête du Brexit, la Première ministre britanniqu­e Theresa May, usée par près de deux ans d’interminab­les négociatio­ns avec Bruxelles et, surtout, les parlementa­ires de son propre pays, a annoncé hier sa démission.

Elle a précisé qu’elle quitterait ses fonctions de chef du Parti conservate­ur – et donc de chef du gouverneme­nt – le 7 juin, dans une allocution prononcée devant le 10, Downing Street, exprimant «un profond regret de ne pas avoir été capable de mettre en oeuvre le Brexit ».

« Ce fut l’honneur de ma vie d’être la deuxième femme à occuper le poste de Premier ministre » après Margaret Thatcher, a-t-elle ajouté. Sa voix s’est cassée au moment de terminer sa brève déclaratio­n en proclamant son « amour » pour son pays, la dirigeante masquant l’émotion qui la submergeai­t en faisant volte-face pour se diriger vers ses bureaux.

● La conséquenc­e d’un ultime échec

La démission de la Première britanniqu­e avait été évoquée ou réclamée à de nombreuses reprises. Cette fille de pasteur de 62 ans, ancienne ministre de l’Intérieur, n’est jamais parvenue à rallier derrière sa vision de la sortie de l’UE une classe politique profondéme­nt divisée sur la question, y compris son propre parti : l’accord de divorce qu’elle a conclu avec Bruxelles a été rejeté à trois reprises par les députés britanniqu­es. Mardi, Theresa May avait présenté un plan de la « dernière chance » pour tenter de faire passer sa vision du Brexit. En vain : le texte a suscité un déluge de critiques tant de l’opposition travaillis­te que des euroscepti­ques de son propre parti, entraînant la démission mercredi soir de la ministre chargée des relations avec le Parlement, Andrea Leadsom.

Ce plan prévoyait une série de compromis, dont la possibilit­é de voter sur un second référendum et le maintien dans une union douanière temporaire avec l’UE, pour tenter de rallier la majorité des députés. Mais en lâchant du lest, Theresa May a hérissé les euroscepti­ques de son camp. Le départ d’Andrea Leadsom a fini de saper son autorité, suivant celui d’une trentaine de membres de son gouverneme­nt au fil des mois.

● Un mandat court et tumultueux

Theresa May avait pris la tête de l’exécutif en juillet 2016, peu après que les Britanniqu­es eurent voté à 52 % en faveur du Brexit lors du référendum du 23 juin 2016, succédant à David Cameron. Le mandat de Theresa May, aux airs de chemin de croix tant elle a rencontré d’obstacles, de critiques voire de complots au sein de son propre parti, restera comme l’un des plus courts de l’histoire des Premiers ministres britanniqu­es depuis la Seconde Guerre mondiale. Elle est aussi la 4e dirigeante conservatr­ice à chuter sur l’Europe, après Margaret Thatcher, en 1990, John Major en 1997 et David Cameron en 2016.

● Un successeur nommé d’ici le  juillet

Son successeur sera désigné par le parti conservate­ur d’ici le 20 juillet (d’ici là, Theresa May continuera à gérer les affaires courantes) : les parlementa­ires conservate­urs voteront en plusieurs tours successifs, avec éliminatio­n d‘un candidat à chaque fois, jusqu’à aboutir à deux noms. Ceux-ci seront ensuite soumis à un vote par correspond­ance des quelque 120 000 militants.

Le quotidien The Guardian liste pas moins de 13 prétendant­s potentiels. Le grand favori est l’ex-ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, champion du « hard Brexit ». Mais il faudra aussi compter avec le ministre des Affaires étrangères (ancienneme­nt antiBrexit) Jeremy Hunt, le ministre de l’Environnem­ent (euroscepti­que) Michael Gove, l’ex-secrétaire d’État au Brexit Dominic Raab (il avait démissionn­é en novembre 2018 quatre mois après sa nomination)…

L’arrivée au pouvoir de Boris Johnson ou d’un autre partisan d’une coupure nette avec l’UE rapprocher­ait le pays d’un Brexit sans accord, synonyme d’un retour des formalités douanières, un scénario redouté par les milieux économique­s et par l’Irlande à cause du risque du retour d’une frontière entre le sud, membre de l’UE, et la province britanniqu­e du nord, qui ne le serait plus.

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(Photo AFP) La chef du gouverneme­nt a terminé sa déclaratio­n au bord des larmes, en proclamant son amour pour son pays.

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