Monaco-Matin

Philippe Stee : « Installer une base sur la Lune »

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Directeur de recherche au CNRS et du laboratoir­e J. L. Lagrange, Philippe Stee est passionné et pédagogue. Pendant près d’une heure, l’astrophysi­cien niçois nous a fait voyager de juillet 1969 jusqu’à aujourd’hui. Depuis le premier pas de l’homme sur la Lune jusqu’au désir de colonisati­on de Mars et de notre système solaire, à la vitesse de la lumière.

Dans quel contexte est née Apollo  ?

Au départ, l’objectif n’était pas scientifiq­ue mais politique. C’était une compétitio­n entre les EtatsUnis et l’URSS pour savoir quelle serait la première grande puissance à envoyer un homme sur la Lune. En , les Etats-Unis ont réussi après huit ans de réflexion. Pour faire le voyage, il y avait trois options : partir de la Terre, se mettre en orbite autour de la Terre, ou se mettre en orbite autour de la Lune. La dernière a été choisie parce qu’elle était plus pratique et moins chère.

Combien a coûté la mission ?

En coût actuel,  milliards de dollars. Pour envoyer à peu près un kilo de matière dans l’espace, ça coûte actuelleme­nt dans les

  dollars. Avec cette mission, on a fabriqué la plus grosse fusée jamais construite : Saturne V. Pour l’envoyer dans l’espace, les lanceurs sont passés de  à   tonnes. Qu’a-t-elle apporté d’un point de vue scientifiq­ue ? Les Américains ont déposé des miroirs, des rétro réflecteur­s, suivis ensuite par les Russes. Il y en a cinq actuelleme­nt sur la Lune qui nous permettent de récolter des données. À l’Observatoi­re de Calern [à Caussols] par exemple, on a développé un laser qui permet de mesurer la distance Terre-Lune très précisémen­t. On a pu déterminer qu’elle s’éloigne d’environ , cm par an et mesure la taille de son noyau [lire par ailleurs]. Mais on a encore pas mal de choses à comprendre sur sa structure interne, comment elle s’est formée. On sait qu’il y a eu un énorme impact lors de la formation de la Terre avec un objet qui devait avoir la masse de la planète Mars. Cet impact aurait arraché de la matière et créé un satellite naturel qu’est aujourd’hui la Lune. Mais rien n’est arrêté, des recherches sont encore en cours. Par ailleurs, près de  kilos de matière lunaire ont été récupérés. C’est intéressan­t, parce qu’il n’y a pas d’atmosphère sur la Lune. Du coup, on retrouve une matière telle qu’elle était à peu près lors de la fabricatio­n du système solaire.

Et d’un point de vue technologi­que ?

Ça a poussé l’industrie aéronautiq­ue. Pour envoyer des hommes dans l’espace, il fallait que les risques soient inférieurs à , %. Donc du matériel fiable. Ils avaient estimé que chaque mission Apollo devrait rencontrer à peu près un millier de pannes. Mais finalement, ils étaient seulement à  pannes par mission. D’autre part, les missions ont développé les circuits imprimés. À l’époque, la Nasa achetait  % de la production mondiale pour ses systèmes embarqués.

Est-il prévu d’y retourner ?

On va remplacer la station spatiale internatio­nale (ISS), en orbite autour de la Terre, par une station en orbite autour de la Lune. Les Américains ont prévu un retour sur la Lune horizon . Ils sont en compétitio­n avec les Chinois. Un de leurs objectifs est d’installer une base sur la Lune. De créer des briques à partir du régolite avec une imprimante D ou de s’enterrer dans une cave. On a vu qu’on pouvait extraire de l’eau et de l’oxygène du sol lunaire qui, une fois traité, nous permettrai­t de vivre sur la Lune. Ce serait un poste avancé pour une future mission vers Mars où on pense qu’il pourrait y avoir des traces de vie. Et permettrai­t ensuite de coloniser d’autres planètes, de comprendre comment elles se forment et évoluent.

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