Le portable « perdu » de Benalla retrouvé par les enquêteurs
« Tous des cons, Alexandre, sois zen et fort » : plusieurs messages échangés avec des responsables de l’Elysée et supprimés ont été retrouvés par les enquêteurs dans le téléphone portable personnel d’Alexandre Benalla [photo
AFP] dont il disait l’avoir perdu, a révélé, hier, Le Monde.
Dès sa première garde à vue le 19 juillet 2018, peu après la révélation par Le Monde de sa participation aux événements du 1er-Mai, Alexandre Benalla avait affirmé avoir perdu ce téléphone ; il s’était présenté devant la police en seule possession de son portable professionnel. En octobre 2018, il disait avoir conservé les données du téléphone sur une clé USB, mais celle-ci aurait également été égarée, « dans ses affaires en Normandie » Pourtant, il a bien remis à la police, en février 2019, une copie du message qu’il a envoyé à Emmanuel Macron dès le 1er mai au soir. Il lui expliquait qu’une vidéo le montrant violenter un couple en marge de la manifestation, place de la Contrescarpe à Paris, tournait sur les réseaux sociaux. « Même si on ne m’identifie pas très nettement, je suis reconnaissable », lui disait-il. Désormais, les enquêteurs en sont convaincus : Alexandre Benalla n’a jamais perdu ce téléphone. Grâce aux réquisitions des juges adressées à l’opérateur téléphonique, ils ont retrouvé la trace du portable et ont constaté qu’il avait écrit au chef de cabinet de Brigitte Macron, Pierre-Olivier Costa, le 22 juillet 2018, à l’issue de sa garde à vue.
« Dans un mois on n’en parle plus »
Les messages retrouvés témoignent aussi du soutien dont a bénéficié l’ancien responsable de la sécurité d’Emmanuel Macron : «Tous des cons, Alexandre sois zen et fort c’est le patron qui décide et à 30 000 kilomètres [Emmanuel Macron se trouve alors en voyage officiel en Australie, ndlr] il ne décide rien te concernant », lui écrit notamment le commandant militaire en second de la présidence de la République Jean-Luc Minet, le 2 mai. « Merci pour ton soutien », lui répond-il. À l’époque, Alexandre Benalla craint d’être reconnu sur la vidéo le montrant rouer de coups un jeune homme, mais le temps passe et il finit par écrire à son complice Vincent Crase : « Profil bas, ça va se calmer. Dans un mois on n’en parle plus. »
Au tour des comptes de campagne
Puis vient l’article du Monde, le 18 juillet 2018 ; avant même sa mise en ligne, Alexandre Benalla est au courant et prévient le directeur général de la gendarmerie nationale, Richard Lizurey : « Bonjour Richard, je tiens à t’informer qu’un article va sortir dans Le Monde sur le 1er-Mai. Amitiés. Alexandre. » . Il se voit répondre: « Comme quoi les journalistes sont bien informés par nos amis… Amitié. Richard.» « Le Monde, ça traduit un certain état d’esprit… », renchérit Benalla, approuvé par son interlocuteur : « Oui, exactement. » Tous ces messages ont été supprimés.
Toujours dans l’édition d’hier, Le Monde épingle aussi Alexandre Benalla dans sa gestion des comptes de campagne du candidat Emmanuel Macron, alors qu’il était directeur de la sûreté et de la sécurité d’En Marche. Selon le quotidien, des membres du service d’ordre (SO) de l’époque sont absents des documents remis à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).