Une mère de famille interpellée à Menton et condamnéepouravoirfaitpasserdeuxmigrantes
Depuis le début des grandes vagues migratoires à la frontière franco-italienne en 2014, le tribunal correctionnel de Nice a jugé des centaines d’affaires de passeurs. Mais le dossier examiné hier après-midi sort quelque peu de l’ordinaire. Et illustre une certaine idée de la misère.
C’est une femme, quadragénaire, mère de famille, qui comparaît dans le box des détenus. Karidja, Ivoirienne âgée de 43 ans, est arrivée en Italie en 2003. Elle y travaille comme femme de ménage pour élever ses trois enfants, dont deux sont encore mineurs. La justice française pense que, dimanche dernier, Karidja s’est risquée à un petit extra qui lui coûte cher : trois mois de prison ferme.
Les forces de l’ordre l’ont contrôlée à bord d’un train en provenance de Vintimille, alors qu’elle voyageait avec une compatriote et la fille de celle-ci. Karidja explique avoir embarqué avec elles à Cuneo, à la demande d’une tante, pour les aider à rejoindre Nice, puis Paris. Juste aider, assure-t-elle. Problème : ses partenaires de voyage étaient en situation irrégulière.
« L’occasion de se faire de l’argent »
Karidja avait sur elle 310 euros en espèces. Soit les 350 euros reçus de la part de sa compatriote, moins le prix des tickets de train. En guise de rémunération ? C’est ce qu’affirme l’autre passagère. « L’infraction est caractérisée au plan matériel, pas moral. Elle nie avoir su que Mme B. était en situation irrégulière », objecte Me Audrey Brun. L’avocate de la défense « sollicite la relaxe, ou à tout le moins, la clémence ».
Pour sa part, le procureur David Coullaud n’est « pas convaincu » que Karidja ait voulu aider.
Il est même « plutôt convaincu qu’elle a trouvé avec elles l’occasion de se faire de l’argent ». Le procureur requiert 6 mois de prison ferme. Le tribunal présidé par Mélanie Cabal divise la peine par deux.
« Je veux rentrer chez moi » , a conclu Karidja quelques instants plus tôt. La mère de famille va d’abord devoir purger sa peine en France. À l’issue, elle y sera interdite de séjour pour cinq ans.