Monaco-Matin

BOL D’OR (- SEPTEMBRE AU CIRCUIT PAUL-RICARD) « Fier d’avoir fini chez Honda »

Contraint de tirer un trait sur sa grande fête de fin de carrière à domicile par le soudain retrait du team Honda Endurance Racing, Sébastien Gimbert a déjà tourné la page. Sans rancune

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON

On peut appeler cela l’ironie du sport. Crevant l’écran à plein badin sur l’affiche de la e édition du Bol d’Or prête à enflammer la piste et le paddock du circuit Paul-Ricard, la Honda CBR RR Fireblade n° brillera bel et bien par son absence les ,  et  septembre en terre varoise. Ainsi l’a voulu le géant nippon qui vient subitement de couper les vivres à son commando britanniqu­e sur le point de repartir pour un tour du monde, du Castellet à Suzuka via Sepang, Le Mans et Oschersleb­en. Un véritable crève-coeur pour Sébastien Gimbert. À  ans - il les fêtera lundi prochain -, le Fréjusien, lauréat puissance  du Bol (, , , chaque fois à MagnyCours) mais aussi des  Heures du Mans (, , ) se faisait une joie de tirer sa révérence chez lui, devant les siens. Il imaginait secrètemen­t une mémorable apothéose en haut du podium avec ses partenaire­s Randy de Puniet et Yonny Hernandez. Rêve envolé, hélas... S’il est présent pour « honorer quelques rendez-vous » aujourd’hui et demain aux essais préBol, la traditionn­elle répétition générale qui réunit tous les cadors (voir ci-dessous), le « pilier » du défunt team Honda Endurance Racing ne partira pas à l’assaut du double tour d’horloge sous d’autres couleurs dans trois semaines. Sa longue trajectoir­e entamée il y a un quart de siècle est finie. Décision ferme et définitive.

Sébastien, quand et comment vous a-t-on appris la nouvelle ?

Le vendredi  août, à  heures du mat’, j’ai reçu un coup de fil de Jonny Twelvetree­s (le patron du team Honda Endurance Racing, ndlr). Rien d’anormal a priori, il m’appelle régulièrem­ent. Mais là, quand je lui demande si ça va, sa réponse m’assomme.

« Non, ça ne va pas parce que notre programme s’arrête maintenant, avant le Bol d’Or », me lâche-t-il. « Je suis vraiment désolé pour toi, Seb’. Tu as toujours répondu présent dans les moments difficiles. Tu nous as souvent sauvé la mise. Avec l’équipe, on souhaitait vraiment te voir finir ta carrière chez nous lors de cette course qui te tient tant à coeur. Hélas, Honda vient de fermer le robinet. Ils veulent miser gros sur la nouvelle équipe et la nouvelle moto engagées en Mondial Superbike, voilà ! »

Vous n’aviez pas senti venir le vent du boulet ?

Non, aucun signe avantcoure­ur. Tout était prêt pour les tests pré-Bol. Motos embarquées, billets d’avion réservés... Idem pour la course : engagement envoyé, motorhome réservé. Honda a changé son fusil d’épaule du jour au lendemain, en choisissan­t de ne laisser

qu’une machine de pointe en EWC (la CBR de la structure nippone F.C.C TSR soutenue par Honda France).

Les résultats décevants enregistré­s lors des trois dernières manches de la saison - ont-ils eu une influence selon vous ?

Même pas... Je pense que l’endurance conserve une image franco-française, ou européenne, vu du Japon. Honda souhaite surtout briller aux  Heures de Suzuka, comme le démontre l’engagement d’une machine officielle cette année. Aujourd’hui, ils estiment tout simplement que le World SBK constitue un meilleur vecteur de communicat­ion que l’EWC. Si vous aviez gagné les  Heures du Mans, l’histoire aurait été différente, non ?

Là-haut, nous loupons le coche de justesse (eà minute de la Kawasaki SRC couronnée championne du monde trois mois plus tard). On n’a jamais été aussi près de la plus haute marche du podium. (Il soupire) Si on gagne le Bol , c’est impossible de nous couper les ailes ensuite. Comme leur décision était prise, pour eux, mieux valait couper le contact avant Le Castellet, hein !

Cette occasion manquée sur le circuit Bugatti, vous l’avez toujours en travers de la gorge ?

Oui et non. Après tout ce que l’on venait de traverser, cette e place sonnait un peu comme une victoire, vous savez. (Sourire)

Un petit problème électrique nous empêche de finir au top, OK. Mais on peut dire que le travail accompli ces deux dernières saisons a produit ses fruits. La nouvelle CBR a pas mal progressé. Nous étions dans le coup partout.

Fort logiquemen­t, on vous sent très déçu. Êtes-vous en colère ?

(Du tac au tac) Pas du tout. Je vais peut-être vous surprendre en disant que je suis très fier d’avoir fini ma carrière chez Honda. Surtout au guidon de la CBR n°. Bien sûr, je regrette de ne pas pouvoir tirer ma révérence à domicile, devant tous les gens qui me soutiennen­t depuis longtemps, famille, amis, sponsors... Mon plan tombe à l’eau. Mais il y a plus grave. Au sein du team, une vingtaine de personnes se retrouve privée de boulot dans l’immédiat. Et puis mes coéquipier­s, Randy et Yonny, deux super pilotes, sont à pied. Il faut relativise­r.

Randy ne figurait pas sur la première liste des engagés publiée en août...

Les négociatio­ns en cours afin qu’il continue avec nous étaient proches d’aboutir. Pour moi, on formait le trio idéal. Terminer ma carrière en compagnie de ces deux «topgun»,enétantà leur niveau, à  ans, c’est génial !

Depuis l’annonce, avezvous été contacté pour disputer le Bol d’Or ?

Deux ou trois opportunit­és sérieuses se sont présentées, oui. Je les ai repoussées. Juste après l’appel de Jonny, durant le week-end, on a beaucoup discuté, réfléchi, avec mes proches. Débat tranché dès le dimanche soir. Je ne ferai pas la course de trop au guidon d’une autre moto que la . Sûr et certain. D’autres challenges m’attendent. Il y a Johan, mon fils, qui grandit vite sur les circuits espagnols. Peut-être le verrez-vous débuter en Mondial Supersport  dès l’an prochain. Il y a aussi le magasin (« Speedway », à Fréjus) qui meuble bien mon planning, l’école de pilotage (Race Experience School) qui continue de se développer, un projet à l’étude avec la ville de Fréjus pour faire rouler des jeunes, justement. La vie est belle, quoi !

Le sel de la compétitio­n ne vous manquera pas un jour ou l’autre ?

Ma priorité, aujourd’hui, c’est de trouver le juste équilibre entre famille et boulot. Une fois cette stabilité acquise, on verra ce que l’avenir nous réserve. Pourquoi pas explorer d’autres champs d’action ? Passer de la terre à la mer, par exemple... Tenez, le jet-ski, ça me botterait bien ! (Rire)

Quels temps forts garderez-vous en mémoire de cet ultime chapitre écrit depuis  avec Honda ?

Les deux podiums enchaînés au Mans en  (e) et  conservent une place à part. Celui du Bol d’Or  (e) conquis in extremis après une chouette lutte finale contre Lucy Glöckner aussi.

Et globalemen­t, lequel de vos six triomphes au Mans et au Bol trônera pour toujours en pole position ?

Sans aucun doute les  Heures de l’an  (avec Sébastien Charpentie­r et William Costes, sur Honda  VTR). Cette victoire compte autant que mon titre mondial (). Parce qu’elle a relancé ma carrière après trois années difficiles en Grand Prix. La première reste première !

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Le jet-ski, ça me botterait bien ! ”

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(Photo Dominique Leriche) Sébastien Gimbert : « Je ne ferai pas la course de trop au guidon d’une autre moto que la Honda n°. Sûr et certain. »

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