Jugés pour avoir « libéré » des dindes, ils veulent faire le « procès de l’élevage »
La meilleure défense, c’est la contre-attaque. Tel semble être l’axe choisi par l’association Boucherie Abolition, à la veille du procès de quatorze militants antispécistes, ce vendredi, devant le tribunal correctionnel d’Evreux (Eure). Un Niçois se trouve parmi eux.
L’affaire avait défrayé la chronique, illustrant la montée en puissance d’une frange radicale parmi les mouvements animalistes. Le 21 mai dernier, les gendarmes réalisaient un coup de filet entre la région parisienne, Tours, Toulouse et Nice. L’enquête portait sur des intrusions, vols et dégradations dans des exploitations en Normandie. Des actions « commandos » pilotées par Boucherie Abolition, qui assimile l’élevage à de l’esclavage. En décembre 2018, des militants s’étaient introduits dans un élevage de volailles de l’Eure, pour en ramener deux dindes et le plein d’images choc. Le 14 avril 2019, trois actions de « libération » consécutives visaient la même ferme, ainsi que deux établissements dans l’Orne et l’Eure-et-Loir. Le coup d’éclat, visant à libérer des « prizooniers politiques »
(sic), s’était soldé par la mort de 1 500 dindes ; elles s’étaient piétinées et étouffées entre elles.
« Les tueurs en série de l’élevage »
Loin de plaider coupable, Boucherie Abolition adopte une posture offensive à l’approche de l’audience, vue comme une tribune médiatique. « Le 20 septembre la résistance en fera le procès de l’élevage, cet esclavage des chairs. Parce que nous n’abandonnerons jamais les victimes », clame l’association sur Facebook. S’affichant le visage et les mains peints couleur sang, ces militants radicaux n’hésitent pas à dénoncer les « tueurs en série de l’élevage », «le viol inséminuateur », « le génocide industriel » et « l’holocauste des zoonimaux ». Ce seront pourtant bien eux qui comparaîtront à la barre. Car leurs actions ont été mal digérées par les agriculteurs et le parquet d’Evreux. Aux douze militants interpellés le 21 mai, sont venus s’ajouter deux autres prévenus, pour recel de vol.
Le Niçois renvoyé devant le tribunal est impliqué dans les trois actions d’avril 2019.
Mesures de sécurité
Selon le procureur d’Evreux, Dominique Puechmaille, «il lui est reproché l’entrave à la liberté du travail, la violation de domicile, les dégradations en réunion, la participation à un groupement en vue de commettre des dégradations ». Le procès permettra d’établir son rôle exact. Aux yeux du ministère public, «saparticipation a été active, ne serait-ce que par le déplacement en Normandie depuis Nice ! » En théorie, il risque jusqu’à 7 ans d’emprisonnement. Le procureur précise que « des mesures de sécurité sont prises pour éviter tout incident ». La police veillera donc au grain, au cas où les militants de Boucherie Abolition souhaiteraient transformer un procès judiciaire en happening revendicatif.