Olivier Bettati candidat à Menton
Interview Olivier Bettati a officialisé hier sa candidature à l’élection municipale à Menton. L’actuel conseiller municipal niçois annonce qu’il conduira une liste au spectre très large
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Olivier Bettati a su ménager le suspense. Même si pour bon nombre de Mentonnais, sa candidature à l’élection municipale des 15 et 22 mars ne faisait pas l’ombre d’un doute – tant le politique niçois est venu chasser sur leurs terres ces derniers mois. Reste que c’est désormais officiel : l’opposant à Christian Estrosi mènera une liste à Menton. Avec le soutien (à demimot) de membres du Rassemblement national… et des Républicains.
Il y a d’autres villes en dehors de Nice, pourquoi choisir Menton ?
J’étais déjà candidat aux élections législatives il y a deux ans. Près de % des électeurs m’ont apporté leurs voix au plus fort de la vague macroniste. Pour moi, cela a constitué une adoption réciproque. J’adore cet endroit. Menton a toutes les qualités que d’autres villes ont perdues. Elle a pour avantage de concentrer tous les fantasmes de la cité méditerranéenne. Mais un certain nombre de clignotants sont passés à l’orange. Il est difficile de parler de ses adversaires mais j’ai le sentiment qu’on arrive à la fin d’un cycle de trente ans. Il faut saluer ceux qui, aux côtés de Jean-Claude Guibal, ont profondément transformé la ville. Mais il y a un moment où il faut proposer autre chose. Sur les grands axes que sont le tourisme et la culture, la sécurité, la smartcity.
C’est une préoccupation niçoise, mais intéresse-t-elle ici ?
Derrière ce gros mot, il s’agit de mettre du wi-fi, une borne rechargeable, une caméra, un système d’envoi de messages d’alertes dans un même lampadaire. Nous avons besoin de ça pour attirer. Il est temps d’admettre que Menton n’est plus une ville de vieux. Et plus simplement, a-t-on le droit de passer à côté de cela ?
Au vu du contexte, ne craignezvous pas une absorption par la Métropole niçoise ?
Dans le département, il y a un pôle central à Nice et un pôle qui s’est constitué à l’ouest – où tous les élus se sont unis pour fabriquer quelque chose d’imprenable, avec des personnalités fortes. La Métropole niçoise, où la taxe foncière a augmenté de % en cinq ans, a besoin d’augmenter son emprise pour ne pas augmenter indéfiniment les impôts. Or, il faut savoir où on se situe sur la chaîne alimentaire. La Carf, elle, se trouve en bas. Aussi Menton a-t-elle intérêt à avoir un maire qui connaît le système Estrosi de l’intérieur. L’histoire politique entre nous deux fait qu’on se connaît assez pour qu’il lui soit inutile de chercher à lutter contre moi ici. Je suis profondément un mec du vieux monde… et c’est ce qui me permet d’établir un rapport de force.
Êtes-vous plutôt l’arbitre ou un instrument de la guerre Estrosi Ciotti ?
Un arbitre ! Si les Mentonnais me font l’honneur de m’élire, je vais construire une troisième entité – avec la même force politique et économique que les deux autres. Dès lors, on pourra discuter d’égal à égal. Le courage, c’est de savoir faire la paix à partir du moment où les choses sont actées. Je tendrai la main à Christian Estrosi pour les déchets, les financements européens… À partir du moment où chacun est chez soi, il n’y a pas de problème pour discuter. Et j’ai beau avoir combattu la métropolisation et la fiscalité, il serait ridicule de ne pas dire qu’il y a eu de belles évolutions à Nice.
N’est-il pas paradoxal d’être soutenu à la fois par Christian Estrosi et le RN Philippe Vardon ?
Je ne suis pas à proprement parler soutenu par eux, mais par les représentants de leurs partis. Et en tant que chef d’entreprise, j’ai appris à aller chercher les meilleurs, d’où qu’ils viennent. Pourquoi me priver d’un talent sous prétexte qu’il vient du RN ? Je refuse l’ostracisme, car je suis un républicain au sens profond. Mon ADN véritable, c’est le RPR. Celui de Pasqua et de Séguin. Mais on n’administre pas une ville au nom d’un parti politique. Une école et une route sont-elles de droite, du centre ou de gauche ? C’est pourquoi mes colistiers appartiendront à toutes les sensibilités. Issus de Debout la France !, LR, RN, voire des mouvements écologistes et centristes. Ma seule limite, c’est LREM, car le parti a pour fondement la création de grandes métropoles et l’absorption des communes.
Quand présenterez-vous votre liste au large spectre ?
En février. Les gens sont probablement à un million d’années-lumière d’imaginer qui va venir avec moi ! J’ai à coeur de mettre en place une politique qui repose sur des valeurs partagées de transparence, d’éthique et de solidarité. Beaucoup l’ont compris et me font l’honneur de leur confiance aujourd’hui. C’est pourquoi certaines listes, dont celle du RN, ne seront pas présentes. Je vise à fédérer, non à diviser. Si on veut la paix civile, il faut prendre tout le monde – même s’il n’y aura jamais d’excessifs dans mon camp.
Quelle différence, au fond, entre le RN et vous ?
Je partage leur avis sur la fracture sociale, la hausse du communautarisme, le voile… Mais je suis plus libéral. Attaché, notamment, à l’euro. Qui peut raconter que je suis un fasciste ? Je défie quiconque de trouver dans mon discours que je suis dangereux. Avoir introduit du bio et de la parité dans mon entreprise ne fait pas de moi quelqu’un du PS… Les étiquettes sont finies.
Vous parlez d’écologie à une époque où chacun repeint sa porte en vert…
La vraie question est de savoir quelle place doit prendre Menton pour développer un tourisme haut de gamme. Il faut pour cela qu’elle devienne la ville verte de la Méditerranée. Sa taille le lui permet. Une action d’urgence consisterait à réorganiser le plan local d’urbanisme. La végétalisation de la cité s’inscrira dans ce cadre. Un plan Climat-Air sera le bienvenu, afin d’installer des énergies renouvelables sur les bâtiments urbains.
Que répondre à ceux qui estiment que vous voulez être élu à tout prix ?
Comme Francis Palmero, le général Aubert ou Jean-Claude Guibal [maires successifs] ,jene suis pas né à Menton, mais j’en suis tombé amoureux. Je ne veux pas être absolument élu. Sans quoi je serais resté adjoint, et je serais aujourd’hui sénateur. Croyez-moi : quitter l’UMP quand elle était forte n’était pas le plus simple. Si j’avais voulu être élu, j’aurais fermé ma bouche. Or le jour où j’ai estimé que la pression fiscale était trop forte à Nice, je suis parti. Je ne suis prisonnier d’aucune idéologie. Et je connais ce milieu depuis tellement longtemps que je sais qu’il y a des idiots partout…