Les enseignements qui ont découlé de la catastrophe
« La catastrophe de Malpasset est devenue l’accident de référence à éviter », assure l’ancien expert géologue au service géologie géotechnique d’EDF, Gilbert Castanier. Drame qui a été suivi en 1963, d’un autre, survenu en Italie, bien pire encore par la succession d’erreurs humaines et le nombre de victimes (1).
Les leçons ont été tirées des diverses anomalies qui ont conduit à la rupture du barrage de Fréjus. « Dans chaque projet et dans chaque site en exploitation ancien, on cherche spécifiquement, par des reconnaissances géologiques préalables, à voir s’il existe une configuration géologique dangereuse » explique Gilbert Castanier. Ensuite, « on met en place un drainage pendant la construction au niveau de la fondation. On organise une auscultation conséquente avec des sondes et des appareils pour prendre diverses mesures : pression, déformation, débit de fuite, etc. Aujourd’hui, le matériel d’auscultation est installé au fur et à mesure de la construction. Et on remplit le réservoir par paliers ».
Le comité technique des barrages
Les spécialistes évoquent également la création en 1966 du Comité technique permanent des barrages (CTPB) composé d’experts de tous les domaines relatifs aux barrages (fondation, structures, vannes, béton) nommés par les ministères de l’Énergie et de l’Environnement. Tout projet doit passer deux fois devant cet organisme dont les membres examinent chaque dossier deux fois, au niveau de l’avant-projet sommaire à la conception puis au niveau de l’avant-projet détaillé. Ses recommandations ont une force contraignante. « Sans son feu vert, pas de travaux.
C’est ou on fait bien, ou on ne fait pas. C’est fondamental », rappelle Jean-Marie Masset. M. Castanier, nouvellement retraité, et ancien représentant d’EDF pour la géologie au sein du groupe de travail barrages-voûtes du Comité français des barrages et réservoirs (CFBR), souligne que les dossiers de travaux et ceux de barrages, dont les auscultations ont donné des valeurs inquiétantes, passent aussi devant le CTPB.
M. Masset voit d’autres enseignements du 2 décembre 1959 : «Aumomentdelacatastrophe, les pompiers et les militaires ont fait au mieux. Aujourd’hui, on a des cellules chez les préfets pour mobiliser les secours, des cellules psychologiques pour les victimes. Et l’État déclarerait un état de catastrophe naturelle pour indemniser les victimes ». Ce qui n’a pas été le cas pour Malpasset. Au passage, Jean-Marie Masset rend hommage à son confrère : « Gilbert Castanier, expert géologue, a fait réaliser les décapages de failles nécessaires pour la construction d’un barrage en Chine sur le fleuve jaune, dans un contexte géologique similaire à celui de Fréjus. Les victimes de Malpasset ne sont pas mortes pour rien. »