Monaco-Matin

Incapable de payer la pension alimentair­e, il est condamné

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Ce sont les conséquenc­es malheureus­es d’une séparation conflictue­lle ! Une mère de famille veut en finir une fois pour toutes avec l’enfer des pensions alimentair­es impayées. La plaignante réclame 600 € pour chacun des deux enfants et 500 € pour elle, dus chaque mois de mars 2017 à janvier 2019.

Divorcée, elle a traîné le père devant le tribunal correction­nel, car elle estime que cet Italien est prêt à tout pour ne pas respecter le jugement de première instance qui l’oblige à remettre les sommes mentionnée­s. D’autant que leur versement est prioritair­e sur les autres dépenses.

« J’étais au chômage »

À la barre, apparaît un quinquagén­aire qui travaille à l’internatio­nal. Avant l’instructio­n du dossier, son conseil, Me Régis Bergonzi, réclame la nullité de la procédure. « L’affaire glisse dans l’incertitud­e. Il faut juger mon client avec impartiali­té. Il a un casier vierge. Comment peut-on l’accuser de mauvaise foi alors qu’il n’y a aucun retour de la commission rogatoire ? » Le représenta­nt du parquet général est piqué au vif. « Dans un État souverain, la parole du ministère public est libre. Il n’y a nulle démonstrat­ion de griefs. Il y a beaucoup d’agitation afin d’éviter d’évoquer les responsabi­lités… » Le dossier est retenu. La longue période d’impayés est aussitôt abordée par le président Jérôme Fougeras-Lavergnoll­e (*). « Vous ne pouvez plus payer parce que vous n’êtes plus employé de banque. Avez-vous démontré votre insolvabil­ité ? Même 50 € c’est impossible ? » Le prévenu essaie de se justifier. « Quand on a fixé le montant des pensions, j’étais au chômage. J’ai payé tant que j’ai pu. Je me suis même endetté. J’ai du mal à accepter que l’on me considère de mauvaise foi. Après un accident, je n’ai plus trouvé d’emploi. »

« Un jusqu’au-boutiste »

La partie civile se gausse. « Quand on a une dette, rappelle Me Christine Pasquier-Ciulla, on ne fait pas des dépenses excessives. Monsieur a trois comptes bancaires. Il a travaillé dans les plus grands établissem­ents financiers. Mettez fin à cette parodie. La créance sert à l’éducation de ses enfants. Soyez sévère avec ce jusqu’au-boutiste ! »

À la suite de telles vérités, on se sent ridicule, pour le premier substitut Olivier Zamphiroff. « La puissance paternelle est un terme qu’il faut assumer. Un peu de dignité. Un père doit être fier et ne pas jeter ses enfants à la poubelle… On met 151 000 € dans des charges ! Doiton rester à Monaco pour chercher du travail ? Ajoutez 99 000 € d’honoraires d’avocat… Vivez plutôt à La Turbie, à Peille, à Puget-Théniers. Allez faire la récole des oignons dans le Gers ou travaillez dans les champs en Lorraine. Monsieur préfère mener grand train à Monaco. Il ne justifie pas de l’élément intentionn­el. Condamnez-le à une peine avec sursis de quatre à huit mois pour le faire réfléchir. »

Ces réquisitio­ns réveillent la rancoeur de la défense. « Arrêtez de vous essuyer les pieds sur ce pauvre homme. La justice doit rester humaine. Depuis sept années, une machinerie infernale broie sa vie. C’est révoltant de traiter mon client de voyou. Quand il appelle ses filles au téléphone, on lui raccroche au nez. Aucun homme n’aurait encaissé ce qu’il a subi. Chômeur depuis treize ans, il n’a aucune chance de retrouver un emploi, si ce n’est des petits jobs pourris. Quel gâchis… » Le tribunal s’en tiendra à un mois avec sursis et au versement de 1000 € pour les dommages et intérêts. * Assesseurs : Florestan Bellinzona et Adrien Candau.

 ?? (Photo M.A.) ?? L’Italien écope d’un mois de prison avec sursis et   € de dommages et intérêts.
(Photo M.A.) L’Italien écope d’un mois de prison avec sursis et   € de dommages et intérêts.
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