Monaco-Matin

L’inoubliabl­e “Berger”

- V.M.

Nos déplacemen­ts ne seront plus jamais les mêmes.

Nos avant-matchs à Saint-Etienne, Paris ou Marseille beaucoup plus moroses. Paul Capietto, le plus célèbre des bergers, nous a quittés, hier matin, à l’âge de  ans dans une chambre d’hôtel de Saint-Martin-Vésubie, où il s’était posé ces trois derniers jours, histoire de recharger les batteries. Fatigué depuis quelque temps, ce fervent supporter de l’OGC Nice a été retrouvé inanimé dans son lit. Il laisse un immense vide autour de lui, des amis en pleurs, deux enfants et des joueurs orphelins de ce personnage emblématiq­ue de la Ligue  à qui ils ont rendu hommage tout au long de la journée d’hier. Paul, c’était d’abord un look improbable, sa barbe blanche, ses cheveux mal coiffés, le short été comme hiver et ce vélo qu’il enfourchai­t comme personne avec des skis, lui l’ancien moniteur de l’ESF qui jurait avoir donné des cours à Hugo Lloris qu’il adulait. Un mythe, semble-t-il... Peu importe, le Berger était aimé de tous. « Il était très attachant, son décès ne m’a pas laissé insensible, témoigne Fred Gioria, qui lui offrait régulièrem­ent des places à l’extérieur et un panier-repas avant le départ du bus après le match. Il ne me disait jamais n’importe quoi, il était très cultivé. Je prenais toujours le temps de l’écouter. »

Discuter avec Paul, sur le parvis de l’Allianz Riviera et bien audelà, c’était surtout de longs monologues sur Jean Moulin et Giuseppe Garibaldi, deux de ses héros, entrecoupé­s d’une série de jongles avec un pilo ou une démonstrat­ion de véloski. Un personnage lunaire auquel le peuple de Nice s’était attaché au fil des années. Du temps du Ray, il s’était fait connaître en regardant les matchs perché dans un arbre entre la tribune Honneur et la Populaire Sud. En , année de la remontée du Gym en Division , il avait escaladé le tableau d’affichage du stade Louis-II pour fêter dans le plus simple appareil la victoire dans le derby. Il refera le show, en , pour égayer le retour de l’OGC Nice en Coupe d’Europe au soir d’un succès à Ajaccio. « Il jouait de sa folie, pose Delphine, propriétai­re d’un restaurant au Boréon, qui voyait souvent Paul et sa longue crinière débarquer dans son établissem­ent. On discutait de foot, de ski, de montagne, de mon fils, beaucoup de ses enfants... C’était un homme de conviction­s, au grand coeur, d’une profonde gentilless­e. Il donnait tout le temps des conseils sur les pistes, avec sa fameuse technique du talon libre. Ici, il était aimé de tous. » Depuis hier matin, le village de Saint-Martin-Vésubie pleure le berger qui ne vivait de rien mais donnait tout les soirs de match à l’Allianz Riviera.

« Savoir qu’il est parti au chaud, ça atténue un tout petit peu ma peine », glisse Delphine, entre deux larmes. C’est autour de la cinquantai­ne que Paul Capietto s’était retiré dans la maison familiale de la Colmiane, sans eau, ni électricit­é. Là-haut, Dominique, l’un de ses proches, avait passé deux semaines merveilleu­ses en septembre. « On avait fait des randonnées dans le Mercantour, des moments magiques, surnaturel­s. Je n’arrivais pas à le suivre. Son sourire va me manquer, c’est très dur. On avait partagé un plat de moules aux châtaignes, un vrai délice... Vous savez, c’était un clown, mais il n’était pas fou. Avec lui, on vivait des instants hors du temps. Je pleure un ami avec qui j’ai partagé des choses simples mais si belles. »

Depuis la retraite, Paul vivait avec  euros par mois. Seul mais pas coupé du monde dans cet arrière-pays niçois où la solidarité n’est pas encore un vain mot. « Il mangeait souvent avec nous, c’était comme un membre de notre famille », confie Delphine à qui il offrait régulièrem­ent des compotes ou des herbes médicinale­s comme de la sauge, cueillie dans ces montagnes tant de fois gravies et qui n’avaient peu de secrets pour lui. Depuis hier, elles ont perdu un vieux compagnon de route. Nous aussi. Ciao le Berger !

Nice-Matin adresse ses sincères condoléanc­es à la famille et à ses proches.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco