Belvédère : qui en veut au relais de la Gordolasque ?
Alors que les travaux d’implantation du relais téléphonique attendu depuis des années viennent de commencer, les engins du chantier ont été vandalisés la semaine dernière
La Gordolasque, sur les hauteurs de Belvédère dans la vallée de la Vésubie : une dizaine d’habitants à l’année et haut lieu de randonnée au coeur du Mercantour. Pas le genre d’endroit qu’on qualifierait de ghetto. «Ona l’habitude de travailler à L’Ariane et au Point-du-Jour et on nous y sert le café, s’effare Serge Benedetti, gérant de l’entreprise du même nom. Et là, on monte à la montagne et on nous détruit nos engins. Les malotrus ne sont pas là où on pense. » Samedi soir, cette entreprise, chargée d’une partie des travaux d’implantation du relais téléphonique attendu depuis des années, a retrouvé ses véhicules saccagés sur le parking Trèminil, où ils étaient restés pendant une semaine.
« Là, ce sont des extrémistes »
Dans cette histoire, personne croit au hasard. Dans les cartons depuis des lustres, l’installation du relais téléphonique dans cette vallée considérée comme l’une des dernières zones blanches du département s’est enfin concrétisée cette année, avec la désignation d’un emplacement. Les engins travaillent sur place depuis deux mois, dans le but de faire aboutir le projet en début d’année prochaine. « Il y a eu des vitres cassées, des pneus crevés, des sièges lacérés, détaille le chef d’entreprise. Ils m’ont bien abîmé les deux engins. Et ce n’est pas des jeunes. La route est fermée. Pour monter là-haut, il faut marcher sur une piste pendant une heure. C’est peut-être un randonneur, un écolo ? Quelqu’un qui passait par là, qui a des idées saugrenues ou quoi. Parce que c’est quelque chose qui dérange ».
« Ce sont des gens qui sont opposés au relais », juge le maire, Paul Burro, qui se dit « très en colère » : « Ce n’est pas un manque de civisme ou de respect, c’est un acte lâche et méprisable, qui n’entame pas ma détermination mais la renforce pour la réalisation de ce projet. Il a fallu cinq ou six ans de travail pour obtenir les autorisations, les financements, la qualification en zone blanche, 600 000 euros de financement… Les gens qui ne veulent pas de portable à la montagne, il suffit de l’éteindre. On peut être réfractaire, mais là, ce sont des extrémistes ». Résultat : les travaux vont prendre du retard.
Une pétition il y a deux ans
De mémoire du maire, une pétition avait tourné il y a deux ans, pour protester contre le relais. Elle avait récolté « 60 ou 70 signatures ». « Il y a aussi des gens qui sont venus nous voir », reconnaît l’élu. Un point de vue marginal ? Au vu de la fréquentation, l’enjeu de sécurité est évident : les randonneurs restent régulièrement coincés sans pouvoir appeler les secours. Les problèmes de réseau empêchent également la vallée de se développer : parlez-en au Refuge de la Gordolasque, qui a dû décaler son ouverture cet été, faute de pouvoir prendre les réservations. « Tout le monde n’était pas d’accord à l’installation de plusieurs relais, se souvient un local, qui compatit néanmoins. La couverture relais était relativement suffisante et on ne connaît pas les risques à moyen terme. La Gordo, c’est dix habitants à l’année, ils ont appris à faire avec. Le plus dur, c’est pour les estivants, pour qui la ligne fixe est lourde à mettre en place. » Idéalisme, peur des ondes ou vandalisme gratuit ? Serge Benedetti ne pense pas avoir la réponse un jour. Il compte porter plainte aujourd’hui, pour faire marcher l’assurance. Pas pour que les coupables soient débusqués : « Là-haut, il n’y a pas de caméra ».