Handke, le Nobel de littérature critiqué pour son révisionnisme
Peter Handke a reçu le prix Nobel de littérature, hier à Stockholm, où manifestants et personnalités ont dénoncé les positions pro-serbes et le révisionnisme de l’écrivain autrichien sur les guerres de l’ex-Yougoslavie dans les années 1990. En décidant en octobre de décerner le Nobel de littérature 2019 au romancier, l’Académie suédoise a suscité une vague d’indignation dans les Balkans et le monde en raison du soutien de l’intéressé à l’ex-homme fort de Belgrade, Slobodan Milosevic. Jusqu’au président turc Recep Tayyip Erdogan, qui s’est dit révulsé par ce Nobel. « Remettre le prix Nobel de littérature pendant la journée des droits de l’homme à un personnage qui nie le génocide en Bosnie-Herzégovine revient à récompenser des violations des droits de l’homme », a-t-il déclaré. Cette polémique éclipserait presque la lauréate 2018, la Polonaise Olga Tokarczuk, quinzième femme à recevoir la prestigieuse récompense depuis sa création en 1901. Le prix 2018 a été dévoilé en même temps que celui de Handke, après son report l’an dernier dû à une affaire de viol et de divisions internes qui a fait imploser l’académie.
Boycotts et démission
Âgé de 77 ans, Peter Handke a reçu sa récompense du roi Carl XVI Gustaf lors d’une cérémonie avec les lauréats des autres prix, à l’exception du prix de la paix, remis un peu plus tôt à Oslo au Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed pour sa main tendue à son voisin érythréen. L’Académie suédoise a salué en Peter Handke « un des écrivains les plus influents d’Europe depuis la Seconde Guerre mondiale ».
Une membre du comité Nobel de littérature, Gun-Britt Sundström, a néanmoins annoncé début décembre sa démission pour marquer son désaccord. Et un éminent académicien, Peter Englund, a fait savoir qu’il n’assisterait pas aux cérémonies. « Célébrer le prix Nobel de Peter Handke serait pure hypocrisie de ma part », a-t-il expliqué. Secrétaire perpétuel de l’Académie suédoise entre 2009 et 2015, M. Englund a couvert les conflits des années 1990 dans les Balkans pour des journaux suédois.
Les ambassadeurs du Kosovo, d’Albanie, de Turquie et de Croatie ont également boycotté les festivités.