L’archevêque et les princes
Quel est votre meilleur souvenir à Monaco ?
(Hésitation) Il y en a beaucoup. Je pense aux moments heureux de la Principauté auxquels j’ai participé : l’avènement du prince, son mariage, le baptême des enfants. Ces moments heureux m’ont d’autant plus marqué que j’étais en première ligne. J’ai senti, à ces occasions, une communion entre les Monégasques, les résidents et la famille princière. Je retiens aussi ces assemblées diocésaines, où je me sentais comme un pasteur au milieu d’un peuple. Je garde aussi un troisième souvenir très fort : la messe chrismale. C’est une messe exceptionnelle qui se déroule juste avant Pâques, dans la cathédrale, où l’évêque rassemble tout son peuple et bénit les huiles qui vont servir aux sacrements. Ce moment de célébration est très intense. C’est là que j’exerce ma responsabilité d’évêque.
À l’inverse, quel est le souvenir le plus triste, le plus douloureux que vous conserverez de ces deux dernières décennies ?
Les funérailles du prince Rainier. Sa maladie, tout au long de laquelle je l’ai accompagné. Ce souvenir est difficile… Les derniers temps, il était dans une sorte de coma. Il entendait ce qu’on lui disait. Je me souviens de ce jour où je lui ai apporté la bénédiction spéciale du pape Jean Paul
‘‘ II, qui était en train de mourir lui aussi. Pendant que je lui parlais, deux larmes coulaient de ses yeux. Ça m’a beaucoup touché… (long silence)
Votre fonction vous rend très proche de la famille princière…
C’est une famille comme une autre, si je puis dire. L’ancien archevêque de Monaco, Mgr Brandt, m’avait dit à propos de la famille princière : « Soyez comme un prêtre proche d’une famille. »
Quelles relations entreteniez-vous avec le prince Rainier ?
Quand j’ai connu le prince Rainier, il sortait très peu de Monaco. Il était très présent dans la vie de la Principauté. Il suivait tout, dans les moindres détails. Il m’impressionnait, par sa connaissance des hommes et des situations. Il avait une profondeur et une vision très importante sur Monaco. C’était le patron, il voyait tout (rire).
Et avec le prince Albert ?
Je me sens très proche de lui parce que nous avons partagé tellement de choses ensemble… Je sens une grande confiance entre nous. Je le dirai à mon successeur : il faut être proche de la famille princière, certes, mais aussi des gens qui sont dans la difficulté, être leur avocat et répercuter leurs besoins.
Les larmes du prince Rainier”