Beausoleil : « Le métier d’enseignant ne fait plus rêver »
À Beausoleil, dès potron-minet, les professeurs grévistes ont barricadé le portail du collège Bellevue à l’aide de poubelles, chaises et palettes. En fond, la banderole « Collège Bellevue en grève » ne laisse guère de doute sur les motivations du groupe. Officiellement, ils ne sont que deux à s’être déclarés grévistes et bloqueurs, de façon à ce que les autres ne soient pas pénalisés sur leur fiche de paye. Mais, dans le fond, tous les présents pestent contre la réforme des retraites, initiée par le gouvernement d’Édouard Philippe.
« Jamais autant entendu parler de reconversion »
Le coeur de la fronde, c’est la crainte de voir leur pension de retraite fondre avec le passage au système par points (1). « Cette réforme est floue, opaque et aléatoire, lance Céline Dervieux, professeur d’EPS depuis neuf ans au collège Bellevue et porte-parole du mouvement beausoleillois. On perdrait entre 600 et 900 euros par mois de retraite. On va finir à la rue pour autant d’années d’études ? Moi, pour ne rien vous cacher, ça fait 17 ans que j’enseigne, je suis à 2000 euros pour un bac +5. » Des conditions de travail qu’ils estiment « difficiles » – encore plus vrai à Beausoleil
où certains enseignants doivent jongler avec les langues pour s’adresser à leurs élèves – qui en rebuteraient certains à passer le concours. « Il n’y a plus beaucoup de candidats aux concours. Ce n’est plus un métier qui fait rêver. On est animés par ce métier mais qui va être prof demain ? On ressent un mépris à notre égard et un ras-le-bol dans le milieu enseignant », poursuit Céline Dervieux. Une autre enseignante embraye : « Le public pense qu’on ne fait que cours mais on ne cesse de nous rajouter des missions pour le même salaire. Celui-ci n’a jamais suivi l’inflation. »
« Je n’ai jamais autant entendu parler de reconversion professionnelle ces dernières années. On n’en peut plus. », souffle Marie Cerf, professeur de mathématiques depuis 2012 à Beausoleil.
En 2017 – quand l’académie projetait de passer l’établissement de la catégorie 3 à la catégorie 2, le rendant moins sensible – les enseignants du collège Bellevue avaient déjà débrayé. Seulement deux heures. Hier, le blocage aura duré jusqu’à 15 heures (2). Aujourd’hui, ils prévoient de débrayer, de nouveau, seulement pendant la récréation du matin. En attendant la journée interprofessionnelle de ce jeudi. Et le résultat des négociations à l’échelle nationale. Le gouvernement annonçait, ce lundi, débloquer 500 millions d’euros pour une augmentation du salaire des enseignants en 2021