Retraites : une mesure d’âge incontournable ?
Édouard Philippe l’a rappelé hier : les partenaires sociaux ne pourront occulter l’âge de départ s’ils veulent respecter leur promesse d’un déficit nul en 2027
Après avoir reculé sur l’instauration d’un âge pivot à 64 ans pour équilibrer le système actuel de retraites, Edouard Philippe a redit, hier, sa conviction : les partenaires sociaux ne pourront faire l’impasse sur une mesure d’âge s’ils veulent respecter leur promesse d’un déficit nul en 2027.
D’un discours à l’autre, le Premier ministre ne dévie pas de sa ligne. « Pour continuer à financer notre système de retraites, il faut que les Français travaillent plus longtemps », avait-il dit en septembre lors de sa présentation de la réforme, avant de moduler légèrement son injonction en décembre, en plaidant pour « inciter », « sans les y forcer », « les Français à travailler plus longtemps ». Contraint, au terme d’un bras de fer d’un mois, à retirer samedi du projet de loi sa mesure d’âge pivot à 64 ans assorti d’un bonus/malus, Edouard Philippe estime cependant que les syndicats désormais en charge d’élaborer le financement au sein d’une conférence devront, à terme, se ranger à l’évidence.
L’« ensemble de mesures » que pourrait soumettre cette conférence « contiendra-t-il une mesure d’âge ? Je le pense », a-t-il déclaré lors des questions au gouvernement. « Car je ne vois pas comment sinon on pourrait arriver à l’équilibre financier en 2027 », a-t-il insisté.
Comme l’Agircc-Arrco
Michel Beaugas, un des négociateurs de Force ouvrière, en est ainsi persuadé : « Au final, la conférence va s’aligner sur l’Agircc-Arrco [la caisse complémentaire des salariés du privé, ndlr] en établissant un âge pivot à 63 ans », prédit-il. Aboutissant ainsi à une sorte de compromis entre la volonté initiale de l’exécutif (64 ans) et l’âge légal actuel de départ à la retraite (62 ans). Simplement, souligne Edouard Philippe, les organisations pourront se servir d’autres leviers pour aboutir non plus à une mesure unique mais bien à un « cocktail ».
A ce titre, le Premier ministre a rappelé les limites de l’exercice : « Nous ne voulons pas que les pensions baissent [...] et parce que nous pensons que c’est important pour la compétitivité de l’économie française, parce que nous nous battons pour rendre la compétitivité de l’économie française, plus grande, nous voulons qu’il n’y ait pas de hausse du coût du travail. »
Mais « une fois qu’on a défini ces deux limites [...] il y aura plusieurs instruments », a-t-il ajouté. Parmi ceux-ci, le gouvernement a même inclus « l’âge d’ouverture des droits à retraite », selon un document envoyé au Conseil d’Etat. Une simple obligation juridique, balaye Matignon, en assurant que « l’âge légal de départ reste à 62 ans ».
Emmanuel Macron prend la parole
L’attachement personnel à une mesure d’âge est dans l’ADN d’Edouard Philippe, qui lors de la campagne d’Alain Juppé en 2016 pour la primaire de la droite défendait un relèvement à 65 ans du départ à la retraite. C’est aussi une façon d’envoyer un message à l’électorat de droite, cible d’Emmanuel Macron depuis son élection en 2017, alors que Les Républicains ne cessent d’accuser l’exécutif de s’aventurer dans une réforme non financée. De leur côté, les syndicats opposés à la réforme des retraites ont organisé, hier, une nouvelle journée de mobilisation.
Quant au président de la République, en visite à Pau, il a, lui, promis de « continuer à expliquer et concerter » sur ce projet. « Quand on prend la peine d’expliquer et d’écouter, on peut lever beaucoup d’ambiguïtés », a déclaré Emmanuel Macron.