Monaco-Matin

Nouveau bac : pourquoi ça coince autant

A partir de lundi débuteront les épreuves communes de contrôle continu pour les élèves de première. De nouveaux écrits taxés « d’improvisat­ion » par les syndicats enseignant­s

- VÉRONIQUE MARS vmars@nicematin.fr

Dans le jargon éducatif, on les appelle les E3C. Issues de la réforme du lycée et du bac remanié, ces épreuves communes de contrôle continu constituen­t la grande nouveauté de cette année. Et ce sont les élèves de première générale et technologi­que qui les testeront. À raison de deux sessions d’épreuves écrites sur des sujets nationaux qui se tiendront, dans les lycées, au cours des 2e et 3e trimestre. Quant aux résultats, ils compteront pour 30 % dans la note finale du bac, nouvelle formule. Voilà pour le principe.

Dans l’académie de Nice, la première session des E3C est dans sa phase de lancement. Elle se jouera à partir de lundi et jusqu’au 14 février pour les 13 354 élèves de cette « promo test ». Au menu, histoire-géo, langues vivantes 1 et 2 et pour les élèves de techno, une épreuve de maths en plus. À charge pour les proviseurs des Alpes-Maritimes et du Var d’organiser dans leur lycée, ces écrits d’une durée de 2 heures maximum.

La grogne monte

Mais la grogne monte. Après les grèves et manifs de l’an dernier contre la réforme du lycée, les profs voient se profiler d’un mauvais oeil ces épreuves qu’ils taxent « d’improvisat­ion ». Et la réplique s’organise. Orchestrée par l’intersyndi­cale réunissant la plupart des organisati­ons enseignant­es (Snes-FSU, SNALC, CGT, SUD, SEUNSA, SGEN-CFDTA...) pour appeler à une mobilisati­on nationale aujourd’hui. L’objectif : faire pression sur le conseil technique ministérie­l prévu mercredi pour demander la suppressio­n de la première session des E3C. Une fronde menée à coups de pétitions, lettres ouvertes au recteur, aux parents... Et même d’appel à boycotter les E3C «en n’assurant pas la surveillan­ce des écrits par exemple, ou en donnant un 20 sur 20 aux élèves » souffle un prof.

Selon le Snes, certains établissem­ents se sont déjà positionné­s pour ce boycott. C’est le cas de Lorgues, Costebelle (Hyères), Dumont d’Urville (Toulon), Bristol (Cannes) Tocquevill­e (Grasse) et Goscinny (Drap) .... Ailleurs, on y réfléchit.

« Les sujets tournent sur les réseaux sociaux »

Pourquoi une telle opposition ? « Parce que personne n’est prêt, attaque Fabienne Langoureau, secrétaire académie du SNES-FSU. Qui va surveiller ces écrits et dans quelles conditions ? Comment assurer l’anonymat des copies qui seront à scanner ? Et comment se dérouleron­t ces correction­s dématérial­isées ? Nous n’avons aucune réponse. Ces épreuves se mettent en place dans des conditions inacceptab­les. »

Et de pointer les sujets fournis par une banque nationale à laquelle ont accès les proviseurs et les professeur­s habilités pour télécharge­r les sujets. « Visiblemen­t ce télécharge­ment est facile, ironise la secrétaire académique du SNES. Depuis la mi-décembre, les sujets tournent en boucle sur les réseaux sociaux. Il y a même des cours privés à Nice qui distribuen­t à leurs élèves des corrigés, jure-t-elle. Comment peuton parler d’équité face à ces épreuves du bac, qui est un examen national ? »

« Les élèves anxieux »

Professeur de maths depuis 20 ans dans un lycée niçois, Didier n’a vu « aucun sujet de maths » sur le net. Lui, c’est la qualité des sujets en maths dans la filière technologi­que qui le chagrine. «Il y en a 200, dont bon nombre ont des exercices très similaires. Du coup le choix est plus restreint. » Autre point noir : la difficulté des sujets. « Les exigences sont trop élevées par rapport au public et au programme étudié à cette période de l’année. En maths, les élèves ont besoin d’être soutenus, remotivés. Avec l’échéance des E3C, les collègues sont en train de cravacher. Ça n’a pas de sens. » Cet enseignant chevronné trouve que les élèves sont plus «anxieux » et « inquiets ». «Ilnefaut pas oublier que la réforme du lycée a chamboulé leurs repères et leurs habitudes. »

Finies les séries L, ES et L. Tout comme a disparu le groupe classe. Les élèves se réunissent par spécialité pour suivre les cours. « Sauf que les groupes changent tout le temps. Pas les mêmes élèves, ni les mêmes profs. Tout cela crée de l’instabilit­é et du stress. »

Didier est prof et père d’un lycéen de première. « À ce jour, je n’ai pas reçu de convocatio­n pour les E3C. Moi, je sais comment ça fonctionne. Mais les parents sont souvent seuls, isolés. Pour eux, c’est compliqué à gérer. »

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