Monaco-Matin

Lucienne, Mathieu et Patricia content leur histoire

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C’est indéniable, il y a eu un avant et un après la maladie. Peu d’entre eux prononcent explicitem­ent le mot « cancer ». « Le mot est parfois difficile à utiliser. Il continue à faire peur. Ils préfèrent utiliser les termes événement de vie ou accident de vie », confirme Valérie Barilaro, présidente d’Écoute Cancer Réconfort. Aucun d’entre eux, non plus, n’use du terme « guérison ». On parle plutôt de rémission. « J’ai des contrôles tous les six mois. 48 heures avant, c’est la panique absolue. Tout le monde le sent. Ça (le cancer, N.D.L.R.) peut très bien revenir », lâche Patricia Perez-Johnson, une Monégasque de 73 ans. «Onnesait jamais vraiment quand on est guérie », embraye Lucienne Faure, 77 ans, native de Saint-Etienne. Malgré la peur, les doutes d’une récidive, le premier mot qui nous vient à l’esprit à l’écoute de leur histoire est celuici : résilience.

■ Patricia Perez-Johnson, 73 ans : « On vit avec »

Un jour de 2011, Patricia pose la main sur son sein. La Monégasque, alors âgée de 65 ans, y découvre « quelque chose qui ne devrait pas y être ». Le verdict des médecins tombe comme un couperet : la maladie s’appelle cancer. Celui-ci dicte alors le rythme de sa vie. Opération, chimio, radiothéra­pie… « Puis, on entend ‘‘c’est bon ça va’’ mais pas ‘‘C’est bon, on verra…’’. On passe les contrôles. Et puis un jour de 2013, c’est la récidive. Et là, on repart à zéro », raconte-t-elle. Le cancer change son rapport au corps. Mais aussi la perception qu’elle se fait de la vie. « On vit avec. Cela change la façon de voir la vie, de voir les autres, de qui va être autour. Il faut un mari qui comprend, qui aide, qui accepte. J’ai eu cette chance », salue-telle.

Et puis, il y a eu l’associatio­n, intégrée à la suite de la rechute. Elle y a trouvé une oreille attentive. Des amitiés. Une famille. « Elles vous ouvrent leurs portes, ne vous obligent jamais à parler. Elles vous offrent juste toutes les possibilit­és d’être bien. Grâce à elles, je sais pourquoi je me lève le matin. Ça m’a permis de prendre ma journée comme quelque chose qui va être à moi, où je vais pouvoir encore donner. Au début, on n’ose pas trop aller aux ateliers. Pour une femme, c’est difficile de se mettre à nu moralement et physiqueme­nt, surtout quand elle est atrophiée. Mais après on se sent bien car on n’est pas seule. »

■ Lucienne Faure, 77 ans : « C’est derrière moi maintenant » Lucienne Faure l’avoue sans ambages : elle est plutôt d’un tempéramen­t discret et pessimiste. Ce jour de 2016, quand on lui découvre une tumeur cancéreuse à l’estomac après une biopsie, elle ne se laisse pourtant pas abattre par la funeste nouvelle. « J’ai d’abord beaucoup pleuré. Et puis, en sortant de l’hôpital, j’ai dit à mon mari que je ne voulais pas me faire bouffer par cette merde. C’est sorti spontanéme­nt. J’ai trouvé la force », sourit-elle. L’opération s’est suivie de onze jours en soins intensifs. Puis deux fois neuf mois de chimiothér­apie. « Maintenant, ça va, je suis en rémission. Le docteur a dit que j’avais un moral d’acier. » L’associatio­n l’a, elle aussi, beaucoup aidée dans sa reconstruc­tion. « J’ai découvert l’associatio­n par l’hôpital. J’y suis allée une première fois mais je n’étais pas prête. Je n’avais pas envie de voir une psychologu­e, de parler de mes problèmes », poursuit-elle. Quelque temps après, elle franchit, de nouveau, le pas-de-porte de l’associatio­n. « Le personnel est formidable. Je me suis fait des amies. S’il y a un problème, elles font tout ce qu’elles peuvent pour vous aider. Sans jamais juger. Je participe au taï-chi, à la gymnastiqu­e et au théâtre. Cela aide à reprendre confiance en soi. La méditation aide beaucoup aussi. Je ne pense même pas aux prochaines échéances. C’est derrière moi maintenant. »

■ Mathieu Lorme, 28 ans : « Ici pour se reconstrui­re »

Le destin ne devrait jamais frapper aussi durement. Encore moins à un âge aussi précoce. Mathieu Lorme, 28 ans, est le benjamin de l’associatio­n. En septembre 2018, une glande mammaire un peu gonflée après une sortie de surf a été l’élément déclencheu­r. « C’était un cancer des testicules avec des métastases au niveau du ventre, détaille celui qui est sapeur-pompier à Monaco. Je me suis fait opérer, j’ai eu plusieurs mois de chimiothér­apie et aussi une opération du ventre. On supporte, on met le cerveau sur le bouton OFF. Depuis le mois de juin 2019, il n’y a plus rien. Je suis en rémission. Tous les trois mois, j’ai des prises de sang et un scanner. » Au début des soins hospitalie­rs, Mathieu Lorme reçoit la visite des bénévoles de l’associatio­n. « J’étais tellement mal que j’étais réfractair­e à la discussion. »

Puis, après mûre réflexion et soutenue par une amie proche, la fille de Valérie Barilaro, Mathieu Lorme passe le cap. « J’y ai rencontré des personnes formidable­s, des profession­nels pour discuter, échanger, dire les choses qu’on n’a pas forcément envie de dire à nos proches. »

Une façon de les protéger. « Et puis parce qu’à un moment donné, on a envie de tourner la page, justifie-t-il. Ce que je retiens de l’associatio­n, c’est ce sentiment de bien-être. On veut se sentir bien après toutes ces épreuves et pas forcément réfléchir. On est ici pour se reconstrui­re. »

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Lucienne Faure.
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Patricia Perez-Johnson.
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Mathieu Lorme.

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