Monaco-Matin

La famille Governator­i mise en cause par des locataires

Une femme est logée à Beausoleil avec ses enfants dans d’anciennes caves jugées impropres à l’habitation par la préfecture. Elle fait état de pressions de la part de Jean-Marc Governator­i, candidat aux municipale­s à Nice

- LAURE BRUYAS lbruyas@nicematin.fr et STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Avenue Foch à Beausoleil. La porte s’ouvre sur une jeune femme. Une odeur de moisissure prend à la gorge. Les murs sont suintants d’humidité, noircis par les champignon­s. Le petit deux-pièces n’a pas de fenêtre : une meurtrière et un soupirail dans le salon, un minuscule fenestron dans la chambre où s’entassent les quatre enfants : 6 ans, 4 ans, 2 ans et le dernier qui marche tout juste. « Mon propriétai­re ne veut pas faire les travaux », affirme Marie.

Une cave à 780 euros par mois

Son « appartemen­t » – d’une quarantain­e de mètres carrés – est pourtant considéré par la préfecture comme un « local impropre à l’habitation ». Dans un arrêté, l’État épingle « un local partiellem­ent enterré, un éclairemen­t naturel insuffisan­t, une aération non conforme et des risques pour la santé des occupants. » En fait, depuis 2015, Marie et ses enfants vivent dans ce qui était, comme l’écrit l’État, des caves. Pour un loyer de 780 euros mensuels.

Le 28 février 2018, la préfecture a contraint le propriétai­re à les reloger. Mais qui est-ce ?

Au cadastre, c’est Juliana Lopez Amador. Elle possède tout le rez-de-chaussée de cet immeuble où vivent d’autres familles dans des conditions précaires. C’est aussi le nom de Juliana Lopez qui apparaît sur le bail. Pourtant, Marie affirme ne l’avoir jamais vue. La jeune mère de famille dit avoir signé son bail avec un homme, celui qu’elle appelle « M. Lopez » et avec lequel elle a souvent affaire.

Sauf que ce « M. Lopez », c’est Jean-Marc Governator­i. Et pour preuve : le numéro de portable avec lequel la famille est contactée par « M. Lopez » est en fait celui de Jean-Marc Governator­i, l’ex-mari de Juliana Lopez. Le couple est divorcé depuis 2019.

« Il vient souvent me menacer »

Jean-Marc Governator­i, l’homme d’affaires niçois qui a fait fortune dans le meuble, se présente volontiers comme « un des plus grands contribuab­les français ». Vice-président national du parti AEI (Alliance écologiste indépendan­te), il est candidat aux élections municipale­s de Nice des 15 et 22 mars, en tête de la liste « Nice écologique ».

On montre à la locataire une photo de Jean-Marc Governator­i sur Internet. Sans une once d’hésitation : « C’est M. Lopez ! Il vient souvent me menacer pour que je paie le loyer », raconte Marie. Dans un courrier du 21 janvier 2019 adressé à la propriétai­re, l’Agence régionale de santé (ARS) fait état de ces pressions : «Ilnousaété signalé que votre locataire aurait fait l’objet de menaces visant à l’inciter à payer le loyer ou à quitter les lieux, ce qui est contraire à ses droits. »

Un mois plus tard, le 18 février 2019, Marie a déposé une main courante. « Hier, le mari de la propriétai­re qui se nomme aussi Lopez est venu me demander l’argent [...]. Il a ajouté qu’il viendrait changer les serrures », avait consigné l’agent de police judiciaire. Noir sur blanc sur ce même document : «La fille de la propriétai­re vient une fois par mois pour me réclamer [l’argent]. »

Malgré cette main courante et les mises en garde de l’ARS, les intimidati­ons n’ont pas cessé, jure Marie : «Depuis quelque temps, je ne le vois plus, lui. C’est la fille qui vient. J’aimerais partir d’ici. Mes enfants sont malades mais j’ai pas assez d’argent : je suis femme de ménage à Monaco. »

À Monaco, là justement où l’ex-femme de Jean-Marc Governator­i et ses enfants vivent.

Le préfet des Alpes-Maritimes a été alerté par ses services, une fois de plus, tout récemment, sur la situation de la famille de Marie.

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(Photo L. B.) Les murs du logement de Marie rongés par l’humidité.

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