Monaco-Matin

Les cent ans du mariage de la princesse Charlotte

Célébré le 20 mars 1920 en la cathédrale de Monaco, cet événement historique permit de sauver la dynastie Grimaldi à la tête de la Principaut­é

- ANDRÉ PEYREGNE Récit réalisé d’après le Journal de Monaco et l’Histoire de Monaco de Thomas Fouilleron.

C1920,

’était il y a cent ans. Le 20 mars

la Principaut­é était en liesse. Ce n’est pas l’arrivée du printemps que l’on célébrait mais un de ces événements qui marquent l’histoire d’un peuple et dont les conséquenc­es se mesurent encore longtemps après.

La princesse Charlotte, fille du prince héréditair­e Louis-II, allait épouser le comte Pierre de Polignac. Celui-ci deviendrai­t ainsi prince de Monaco, abdiquant son patronyme au profit de celui des Grimaldi. Ainsi serait sauvée la dynastie Grimaldi qui était alors en péril. L’événement était observé dans le monde entier. Ce matin-là, vingt et un coups de canons ébranlèren­t la Principaut­é. Un cortège de voitures sortit du Palais pour se diriger vers la cathédrale. La foule était massée sur la place, portée par l’enthousias­me populaire qu’ont toujours suscité les mariages princiers. Les oriflammes battaient au vent.

Entre deux haies de gardes, les délégation­s monégasque­s et étrangères gravirent le tapis rouge déployé sur l’escalier monumental de la cathédrale. Le prince Albert-1er. apparut en habit vert de membre de l’Institut, décoré du grand cordon de Saint Charles.

On aperçut ensuite la mince silhouette du futur marié, le prince Pierre, âgé de 25 ans, mince, blond, vêtu d’une jaquette de cérémonie, cravate et gilet blancs. Il était au bras de sa mère, la duchesse de Polignac.

Qui était-elle ?

Tandis que dans la nef résonnaien­t les accents de la marche nuptiale composée par Léon Jehin, directeur de l’orchestre symphoniqu­e, la foule applaudit l’entrée du prince Louis en uniforme d’officier, tenant à son bras sa fille Charlotte de Valentinoi­s. Les voiles de tulle qui enveloppai­ent avec légèreté la robe de soie blanche de la future mariée, donnaient à cette jeune femme de 22 ans une allure féerique. Elle était coiffée à la garçonne, la tête ceinte d’une couronne de fleurs d’oranger.

Qui était-elle, la future princesse Charlotte ? La fille illégitime que le prince héritier Louis-II avait eue en 1898 en Algérie avec une certaine Marie-Juliette Louvet, alors qu’il était lieutenant au troisième Régiment de chasseurs.

Son père, le prince Albert-1er, s’était par la suite opposé au mariage de son fils et avait organisé une éducation discrète pour Charlotte dans une institutio­n religieuse près de Paris. En 1911, Albert-1er avait finalement accepté de lui conférer le titre de Mademoisel­le de Valentinoi­s. Puis, en 1918, s’était posée la question de la succession du prince Albert 1er.

Si celle-ci revenait de droit au prince Louis-II, on trouvait au deuxième rang un cousin né du mariage de la tante d’Albert-1er. avec un prince allemand. La France ne pouvait tolérer l’éventualit­é que Monaco passe sous giron allemand et avait pressé Albert-1er de légitimer Charlotte dans l’ordre de succession au trône. Cela avait été fait en 1919 en présence du président de la République, Raymond Poincaré. C’était donc une future princesse monégasque qui se mariait en ce 20 mars 1920 et que le peuple acclamait.

« Soutenez-les et je réponds de votre avenir ! »

L’union fut célébrée par le cardinal Luçon, évêque de Reims. « Le peuple, vos familles, les amis de vos familles ont le pressentim­ent que votre union, bénie de Dieu et acclamée des hommes, est le prélude, pour la Principaut­é de Monaco, d'un avenir de paix et de bonheur, déclara-t-il. Fasse le ciel que ces douces espérances deviennent bientôt d'heureuses réalités ! »

La sortie de la cathédrale se fit sous les vivats de la foule. Décidant de revenir à pieds au Palais, les époux eurent tant de mal à se frayer un passage que le cortège dut avancer en file indienne. On remarqua alors que la mariée était passée devant le prince. Le protocole en fut offusqué !

Cela n’empêchait pas la joie populaire d’être à son comble et les oriflammes d’être agités aux balcons. Le peuple fut invité à entrer dans la cour du Palais. Depuis la galerie d’Hercule, qui s’étend au-dessus de l’escalier monumental, le prince Albert-1er prit la parole : « Aujourd'hui, je vous amène mes petits-enfants. Aimez-les, soutenez-les et je réponds de votre avenir ! »

L’avenir de la Principaut­é était en effet assuré. En décembre 1920 naquit la princesse Antoinette et en mai 1923 le prince Rainier. Le 30 mai 1944, veille de sa majorité, la princesse héréditair­e Charlotte abdiquait en sa faveur. La dynastie Grimaldi était sauvée. La Principaut­é rassurée.

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