Tournées difficiles pour les infirmiers de La Bocca
Réunis en association : l’ABIL, les infirmiers et infirmières libéraux qui oeuvrent dans ce quartier cannois vivent parfois des situations angoissantes. Ils s’inquiètent aussi pour les semaines qui arrivent
Levés à 6 heures. Couchés tard le soir. Les infirmières et infirmiers libéraux donnent tout leur coeur dans la lutte contre le virus. Ils sont une quinzaine à sillonner le territoire de La Bocca chaque jour. Une mission difficile, troublante, frustrante parfois dans les circonstances actuelles. Mais une mission que la pandémie fera évoluer vers du meilleur, cela Lise Leverd, présidente de l’association qui les rassemble en est convaincue…
Vous nous expliquez l’ABIL : association que vous présidez ?
Il s’agit de l’association boccassienne des infirmières et infirmiers libéraux. Nous sommes une trentaine de membres en tout et fonctionnons majoritairement en binômes. Nous travaillons également avec la CIL (Coordination des infirmiers libéraux) : notre homologue à Cannes et au Cannet. À nous tous nous représentons plus d’une centaine d’infirmiers libéraux.
Comment vous organisez-vous ?
Nous avons créé un groupe WhatsApp. Cela nous permet d’interchanger en permanence, de partager des informations, de répondre le plus rapidement possible aux demandes de prise en charge de patients et actuellement, de nous organiser et de réagir si l’un d’entre nous se retrouvait en confinement.
C’est arrivé ?
Sur notre secteur, une infirmière est actuellement bloquée en Espagne et sa collègue travaille /. L’association permettra de lui venir en aide si ça devient trop Il y a le présent que nous gérons à peu près. Et l’avenir qui nous inquiète. Nous avons des personnes fragiles et isolées que nous ne voulons pas laisser tomber. Aujourd’hui, nous avons allégé les tournées pour réduire les expositions au virus. Mais nous nous heurtons à un problème de pénurie de masques. Une dotation de masques chirurgicaux nous arrive, c’est vrai, mais elle est insuffisante et il faut prioriser. Dans certains cas, les masques FFP sont indispensables, mais nous n’avons pas encore été approvisionnés. C’est une situation inédite compliquée et stressante. Dans le même temps, on entend qu’on ne va manquer difficile pour elle. Ce n’est que le début de l’épidémie, et nous sommes conscients que les difficultés sur les tournées des infirmières vont aller en augmentant.
C’est toute votre difficulté : soigner tout en vous protégeant et en protégeant votre environnement. Comment voyez-vous les choses ?
de rien… C’est un peu troublant. Heureusement cette situation, même si elle crée de la peur, elle provoque aussi de la solidarité. Avant cela, les infirmiers libéraux fonctionnaient plutôt seuls. Maintenant ils s’appellent s’entraident, prennent soin les uns des autres. Cette situation aussi terrible soit-elle nous apprend à travailler ensemble.
On a entendu que certains d’entre vous étaient un peu bousculés…
Oui, malheureusement, il arrive qu’on se sente en insécurité. On retrouve des crachats sur les poignées de portes et les boutons d'ascenseurs. On nous provoque un peu lorsqu’on revient à notre voiture en nous disant que si on a des masques, il faut les partager. Tout cela engendre, il est vrai, du stress. Nous avons signalé cela et on nous a donné un numéro de téléphone en cas d’urgence. Mais on sait aussi que la police municipale est prise de tous les côtés.
En quoi les prochaines semaines vous inquiètent-elles ?
D’ici quelque temps, nous allons avoir des patients actuellement atteints du virus et hospitalisés qui vont être renvoyés chez eux. Que va-t-on faire ? Nous ne pouvons pas nous retrouver avec des tournées mixtes de patients risquant d’être encore porteurs avec des patients non contaminés. Comme nous fonctionnons en binôme, va-t-il falloir que l’un des deux s’occupe de la tournée des personnes contaminées et l’autre celle des patients habituels non infectés ? Si c’est pour cette formule que nous optons nous travaillerons jours sur , avec beaucoup d'incertitudes et de fatigue. C’est vraiment une problématique vers laquelle nous allons et pour laquelle, pour le moment, nous cherchons des solutions.
Q : Existe-t-il des organisations vers lesquelles vous tourner ?
R : Nous travaillons avec la CPTS Pays de Lérins, (communauté professionnelle territoriale de santé) Son but est de regrouper les acteurs de santé de Cannes et du Cannet pour mener à bien des projets de santé, et la PTA (plateforme territoriale d’appui) de Cap Azur qui nous aide à trouver les bonnes ressources pour nous organiser du mieux possible entre professionnels de santé de ville. Mais ce sont de toutes jeunes organisations, qui démarrent dans des conditions sanitaires vraiment particulières…