Union nationale de façade ?
Union nationale ? Union sacrée dans cette période unique, inédite de la vie politique française ? C’est vite dit. Certes, dans un consentement général, Edouard Philippe a fait adopter, hier, par les élus le projet de loi instaurant l’urgence sanitaire en France. Droite et gauche, réunis en formation réduite comme l’impose la distanciation sociale de sécurité face au coronavirus, au Sénat et à l’Assemblée nationale, n’ont pas voulu, ne veulent pas – et c’est à leur honneur –, se déchirer au moment où les Français sont atteints, souffrent ou ont peur, c’est-à-dire à un moment où ils ont plus que jamais besoin d’être rassurés. Position appuyée en dehors des hémicycles, hier soir, par deux personnalités aussi différentes que Nicolas Hulot et Xavier Bertrand. « Tout est encore possible, mais dans la solidarité », a dit le premier.
« Zéro polémique », a affirmé avec force le second. Jean-Luc Mélenchon, luimême, a eu d’emblée cette phrase fin février, lorsque les groupes parlementaires ont été consultés par le gouvernement : « On ne manquera pas de la solidarité qui s’impose. » Mais en réalité, La France insoumise, même avec les premières précautions de son chef, et le Rassemblement national de Marine Le Pen continuent de s’inscrire en dehors de l’union sacrée qui prévaut entre les partis de gouvernement. Autant Edouard Philippe trouve sans difficulté les mots pour dialoguer avec Bruno Retailleau, président du groupe parlementaire LR au Sénat, autant Jean-Luc Mélenchon, hier, en mettant l’accent sur France-Info, sur la nécessité d’en « finir avec l’égoïsme social » en a profité pour défendre ses thèses habituelles : priorité au service public, refus du marché-roi, relocalisation. Qui mènerait cette politique, lui a-t-on demandé ? Cri du coeur de Mélenchon : en tout cas, pas Emmanuel Macron. Quant à Marine Le Pen, son attitude est encore plus éloignée de l’union nationale : elle n’a même pas fait semblant de jouer le jeu du Parlement, où elle n’a guère été présente, au contraire de Mélenchon. Elle ne cesse d’ironiser sur « l’amateurisme » du président de la République, elle prétend avoir vu venir, dès le mois de janvier, une pandémie majeure. Bref, elle le sait, les différents sondages la créditent, aujourd’hui, d’un score analogue à celui d’Emmanuel Macron à un éventuel premier tour de l’élection présidentielle. Elle n’attendra pas pour jouer son rôle de premier adversaire du président de la République, crise sanitaire ou pas.
« [Marine Le Pen] n’attendra pas 2022 pour jouer son rôle de premier adversaire du président de la République, crise sanitaire ou pas. »