Des « Filles des Lumières » dans le Menton d’antan
Expatriée en Norvège, Marie-Christine Stigset publie le premier volet d’une trilogie de romans dont l’intrigue prend vie dans le Menton des années 1770
C’est l’histoire de trois soeurs : Marina, Laetitia et Catharina. Trois jeunes femmes téméraires, imprégnées de la philosophie des Lumières et décidées à défier les interdits de l’époque prérévolutionnaire, dans laquelle cette trilogie de romans prend vie.
Écrite par Marie-Christine Stigset, la fiction raconte la destinée des trois soeurs en trois tomes. Le premier épisode suit les péripéties de Marina, dite Marinella, partie de sa Corse natale pour exercer la médecine dans… la cité des citrons. «Unséjour à Menton dans les années 2000 m’a fait découvrir les charmes de sa cité médiévale », raconte la Française expatriée à Oslo (Norvège) depuis plus de 40 ans.
Menton à la veille de la Révolution
Séduite par l’authenticité de la vieille ville, Marie Christine Stigset y a non seulement acheté une résidence secondaire mais aussi étudié son histoire passée, grâce aux archives de la ville, des témoignages d’anciens et les précieuses publications de la revue Ou Païs Mentounasc.
C’est donc dans ce Menton des années 1770, à la veille de la Révolution, que les aspirations de Marinella vont grandir. La guérisseuse, pratiquant la médecine des plantes, ira jusqu’à s’attirer les foudres de l’Inquisition, qui l’accusera de sorcellerie. « Ce livre parle de deux visions du monde qui s’entrechoquent. Celle divine, imposée par les croyances de l’Église et incarnée dans le roman par un fanatique religieux, face à celle plus scientifique et raisonnable d’une érudite, incarnée par Marinella », explique l’auteure, soulignant que le procès en sorcellerie de l’héroïne est inspiré d’un fait bien réel. Celui de Peirinetta Raibauda, en 1623 à Castellar. « J’ai réutilisé une partie du compte rendu du procès, conservé aux archives de l’évêque de Vintimille. Quand vous lisez ce qui s’est passé, c’est hallucinant. Elle a signé des aveux car elle ne supportait plus les mauvais traitements qu’on lui infligeait et a finalement été exécutée. M’inspirer de son procès était une façon de la réhabiliter. » Il s’agirait, par ailleurs, de la dernière exécution d’une sorcière dans les Alpes Maritimes.
Quant à l’héroïne du roman, elle « sait que sa logique et son intelligence ne suffiront pas à la sauver mais elle refuse de signer les aveux. Elle ne veut pas donner satisfaction de capituler. Pour elle, résister à la torture est une victoire. Elle préfère aller au bûcher ». L’histoire en décidera-t-elle autrement ? Au fil des pages, c’est tout le paysage du Menton d’antan qui se dessine, ses croyances et ses coutumes, de la cueillette de la lavande à la culture du citron, les restanques, les roches rouges ou encore les moulins à huile. Avec toujours, en trame de fond, ce questionnement sur la place de la femme dans une société régie par des hommes. « Quelque part, il y a beaucoup de modernité dans ce livre. Même si c’est une fiction, elle invite à une réflexion sur les évolutions qu’on a réussi à faire et les combats qu’il reste encore à mener », espère l’auteure.
Deux autres tomes à venir
Les deux tomes suivants sont consacrés aux destins des deux autres soeurs. Laëtitia, désireuse de découvrir le Nouveau Monde, embarquera déguisée en garçon comme mousse sur une frégate à destination du Brésil où elle passera un an chez les Indiens Tupi. Les tribulations des trois soeurs se terminent avec le tome 3 dédié à la cadette, Catharina, emmenée en captivité par des corsaires barbaresques, direction les marchés aux esclaves d’Afrique du Nord.
La couverture qui « reproduit la cité médiévale telle qu’elle était à l’époque » est signée du peintre anglais Christopher Heald. « Lui aussi amoureux de Menton, il fait avec son pinceau ce que moi je fais avec ma plume : célébrer et souligner la beauté de la cité. »
Le tome 2 sortira au printemps et le 3 « cet été ou cet automne ».
Le premier tome – Filles des Lumières - Marinella – vient de paraître aux Éditions du Bord du Lot. Il pourra être commandé prochainement à la Maison de la presse et à la Librairie de la presse à Menton au prix de 17 euros.