Des caisses aux rayons, ils
Tandis que les soignants soignent, eux nous nourrissent. Malgré la peur latente du Covid-19, les employés de la grande distribution sont sur le pont. Et les renforts sont parfois durs à recruter
On vous remercie d’être là. » « C’est vraiment gentil... » « Vous êtes courageux ». « Merci ! » Depuis plus de quinze jours maintenant, les hôtesses de caisse savourent ces marques de sympathie. Elles n’y étaient pas forcément habituées. « Merci, tellement merci madame, tellement », s’est exclamé sur Twitter le chanteur Julien Doré, accompagnant la vidéo d’une caissière aux cheveux grisonnants et aux yeux rougis. Les milliers de likes et retweets disent quelque chose de notre gratitude collective. Tandis que les soignants soignent, eux nous nourrissent. Et ce n’est pas rien. Face au coronavirus, l’ennemi sournois et invisible, la grande distribution est en ordre de bataille. Passé l’hallucinant rush du pré-confinement, les magasins alimentaires trouvent une sorte de rythme de croisière. Avec, ici ou là, des difficultés à maintenir l’équipage à flots, entre arrêts maladie et gardes d’enfants.
« Oui, certains de nos magasins, drives et entrepôts ont besoin de renforts, afin de permettre à nos concitoyens à s’approvisionner sereinement en denrées de base », annonçait Carrefour sur Linkedin il y a une semaine. Encore fautil rassurer les candidats. Le géant de la grande distribution assure avoir pris d’emblée « des mesures drastiques de protection individuelles et collectives », « réduit les horaires des supermarchés et hypermarchés », et amorcé dimanche, « sitôt la réquisition levée », la distribution de 2 millions de masques à ses employés.
L’explosion du drive
Chez certaines enseignes, ça recrute donc. Ou plutôt, «ça cherche à recruter ». Jacques Kotler, chargé du commerce à la CCI Nice Côte d’Azur, le constate : « Ce n’est pas évident de trouver des candidats. Parmi leur personnel, certaines personnes sont en maladie ou confinées avec les enfants à la maison. Les grandes surfaces arrivent à s’en sortir, même lorsqu’elles sont sur le fil du rasoir. Notre préoccupation principale, c’est la petite entreprise... »
Équipes réorganisées
Chez les «gros» , les besoins sont assez faciles à identifier. Il suffit d’observer le cortège de voitures à leurs portes. «Le coronavirus est, malheureusement, le meilleur ambassadeur du drive ! », constate Jacques Kotler. Dès lors, les besoins en personnel se font sentir « dans les drives et dans les entrepôts, en CDD ou intérim. » Ça recrute ? Pas partout. Du moins, pas chez Leclerc, assure un interlocuteur en off. « Tout notre personnel est là. Il est équipé de masques, plexi et gel depuis le début... Pour nous, c’est un non-sujet. » Ce n’était manifestement pas le cas pour l’hypermarché du Cannet-Rocheville (lire en page 9).
Chez Auchan non plus, « on ne recrute pas. On n’en a pas besoin, indique le service communication national. On a un taux d’absentéisme relativement bas, de l’ordre de 20 %. Sur la base du volontariat, on arrive à basculer des équipes vers des services drive ou alimentaires. On travaille à périmètre constant. Nos collaborateurs sont très engagés et très mobilisés pour venir servir les clients. »
À Auchan La Trinité, le délégué syndical CFDT confirme. « On répartit les effectifs en fonction des besoins. C’est assez souple. » Dans l’adversité, les équipes se veulent plus solidaires, plus soudées. Car « il y a de l’angoisse, bien sûr. Mais c’est comme tout : on s’habitue à l’angoisse. »
Dossier : CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr LAURIANE SANDRINI lsandrini@nicematin.fr ET ARNAULT COHEN acohen@nicematin.fr