« Protégez-vous, protégez-nous ! »
Elle vient de boucler une journée encore bien remplie. « Il y a des jours, c’est compliqué. Et d’autres où ça l’est un peu moins », confie Corinne Mazzocca, 55 ans. Hôtesse de caisse chez Auchan La Trinité, elle compte vingt ans de métier. Les jours avec ? « Ces gens (plus de 80 %) qui nous félicitent, nous remercient ». Les jours sans ? Ces clients désagréables – les mêmes que d’habitude – qui soufflent leur agacement lorsqu’elle leur rappelle les distances de sécurité.
« Samedi, la caisse-minute s’est bloquée, témoigne Corinne Mazzocca. J’ai dit au monsieur, accompagné de sa fille, de reculer. Il n’a pas bougé. Je l’ai répété. Il m’a dit : « Vous avez un mètre ? » Je lui ai répondu : « Si vous ne voulez pas me protéger, c’est votre choix. Mais faites-le au moins pour votre fille... » Bref, « soit ça se passe bien, soit ça se passe très mal ». Côté sécurité en revanche, Corinne Mazzocca salue «les efforts » consentis par Auchan : « masques, gants, plexi sur les caisses, marquage au sol... » Certes, elle n’est «pas d’une nature angoissée. Mais quand je vois des clients réagir comme ça, c’est grave... Protégez-vous, protégez-nous ! Qu’est-ce que ça va changer à votre vie, de passer derrière la ligne ? »
Hormis ces conditions inédites, l’hôtesse de caisse expérimentée fait son « travail comme d’habitude ». Ah, une différence de taille, tout de même : « Le regard de certains clients a changé. Maintenant, ils nous disent merci. ça fait chaud au coeur. On se sent un peu importants », admet-elle, un brin gênée. Cet état de grâce durera-t-il survivra-t-il à la crise ? Elle l’espère. Mais elle en doute. « Les gens oublient vite... »