Le retour en classe s’annonce compliqué
Face à une reprise des cours envisagée le 4 mai, les profs azuréens estiment que cette fin d’année doit être réorganisée avec un allégement des programmes et des examens, dont le bac
Alors que le confinement est prolongé jusqu’au 15 avril pour l’instant, le ministre de l’Éducation nationale, JeanMichel Blanquer, envisage le retour en classe le 4 mai, « en fonction de l’évolution de l’épidémie ». Ce scénario « possible » permettra-t-il de sauver l’année scolaire ? De maintenir, en l’état, les examens, le brevet du collège, le bac, les épreuves communes de contrôle continu (E3C) et dans quelles conditions ?
« Pas un retour de vacances »
Pour les enseignants, qu’elle se joue le 4 mai ou plus tard, la rentrée ne sera pas si simple. «Ceneserapasunretour de vacances, mais la fin d’un long confinement. Et il se passe différemment selon les familles, l’entourage, le quartier, glisse Sylvie Pénicaut secrétaire académique du SNPDEN-Unsa, syndicat des chefs d’établissement. Cette proviseure du lycée Apollinaire à Nice s’inquiète de ce mois et demi d’isolement vécu par les jeunes au fil de cette crise sanitaire, avant d’ajouter : « Bien sûr, on sera tous contents de se retrouver. » À la question, peut-on reprendre les cours sans modifier le reste de l’année scolaire, ni les programmes, la réponse, de l’école au lycée, est unanime. Et c’est « non ».
% d’élèves en télétravail : « faut pas rêver ! »
Depuis quinze jours, l’école se fait à la maison, en mode télétravail. Cours et leçons déposés en ligne, classes virtuelles, livres à lire, devoirs à rendre par mail… « En primaire, on est plutôt dans le confortement des acquis, le maintien des connaissances, estime Gilles Jean, secrétaire départemental du SNUIpp, syndicat enseignant. Non dans une logique de progression qui ne peut se faire qu’en classe. »
Dans le secondaire, c’est le même avis qui domine. Les cours sont préparés par les profs qui se sont décarcassés pour trouver des applis sympas. Histoire de diffuser leurs leçons en mode « salon où l’on cause » pour mieux avancer dans leur programme. « Bien sûr, ce n’est pas le même rythme ni le même suivi qu’en classe, tempère Fabienne Langoureau, prof de français au lycée Calmette à Nice et secrétaire académique du Snes. Il y a des exercices, des entraînements que l’on ne peut pas faire à distance et des élèves qui décrochent qu’il est impossible de rattraper. » S’ajoutent les difficultés techniques, des plateformes, comme Atrium pour les lycées, saturées de connexions car non conçues pour basculer au 100 % téléenseignement, les « zones blanches » où Internet passe mal ou pas du tout, les ordinateurs à se partager à trois ou quatre par famille… « Faut pas rêver ! s’exclame Sylvie Pénicaut. Les 100 % d’élèves au télétravail, on n’en est loin, entre les 5 % jamais connectés, et les deux à trois lycéens par classe qui ne rendent jamais les devoirs. Cela malgré le travail fou accompli par les profs et l’aide des collectivités en tablettes tactiles. »
« Réaménager la fin d’année »
Profs et chefs d’établissement vous diront que le télétravail ne comble pas les inégalités. Il les creuse. Tous ont des témoignages en tête. Comme cette maman, aide-soignante sur le front du Covid-19, qui a confié à l’enseignant de son enfant que de retour à la maison, après une journée de travail, elle n’avait « juste pas la force de répondre à ses questions. » À la rentrée, le 4 mai – si elle a lieu – c’est tout cela qu’il faudra reprendre. Combler les lacunes, avancer dans le programme, préparer les conseils de classe du 3e trimestre, les orientations, boucler Parcoursup, entraîner les lycéens de terminale au bac, et ceux de 1re aux écrits des E3C… De quoi donner le tournis. « On ne pourra pas le faire sans réaménager cette fin d’année et le bac avec », prévient Fabienne Langoureau. Au Snes, on a des idées, en attendant les décisions du ministre Blanquer pour aménager l’ultime édition du bac ancienne formule, crise de coronavirus oblige.