Cannes : l’infectiologue voit « la lumière au bout du tunnel »
« La progression se fait à un rythme supportable, probablement grâce aux mesures de confinement », rassure le Dr Vassallo, chef du service d’infectiologie. Parmi ses patients, toujours plus de personnes âgées
Il y a un mois, presque jour pour jour, alors que la région ne comptabilisait encore que quelques cas de coronavirus, il nous alertait sur la progression inquiétante de l’épidémie en Italie, et nous livrait son analyse experte de la situation sur le territoire. Responsable du service d’infectiologie de l’hôpital de Cannes-Simone Veil, très tôt mobilisé dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus, Le Dr Matteo Vassallo fait état des nouvelles connaissances acquises avec la progression de l’épidémie dans les A.-M.
Comment se sont passées les dernières semaines ?
Elles ont été très difficiles, nous étions extrêmement sollicités. En phase de l’épidémie, au moindre soupçon de Covid-, nous étions appelés par le Samu, mais aussi les patients euxmêmes et nos confrères de ville… L’enjeu étant de ralentir la progression de l’épidémie.
Et aujourd’hui ?
La situation s’est un peu apaisée. La médecine de ville prend désormais en charge beaucoup de patients, elle réalise un tri, et seuls les cas les plus sévères nous parviennent.
L’unité d’infectiologie estelle à saturation ?
Non, pas à ce jour. D’autant que nous disposons désormais de deux services dédiés aux patients Covid, le nôtre et la pneumologie.
Pouvez-vous nous donner quelques informations sur les cas graves admis dans votre service ?
À ce stade de l’épidémie, les personnes âgées composent la majorité des patients hospitalisés. Elles semblent, comme cela avait été évoqué dès le début, les plus à risque de formes graves. Et elles ne disposent pas de ressources suffisantes pour supporter les soins très lourds de réanimation.
Beaucoup décèdent ?
Malheureusement oui. On a pris en charge plusieurs personnes âgées victimes des épidémies qui ont sévi au sein d’EHPAD, et que l’on n’a malheureusement pas pu sauver.
Quelle est la cause du décès chez les personnes âgées touchées par le Covid ?
Elles décèdent des complications respiratoires liées à l’infection. Comme on teste systématiquement la grippe, on s’est aperçu que parfois les patients âgés atteints de Covid- sont coinfectés par le virus de la grippe.
Retrouve-t-on chez ces personnes âgées malades des facteurs de risque ?
La dénutrition, consécutive à une insuffisance d’apports alimentaires - et mise en évidence via la mesure du taux de pré-albumine dans le sang, apparaît comme un facteur d’évolution défavorable.
Comment les personnes âgées continuent-elles de se contaminer ?
On n’est plus capable de le dire aujourd’hui. On ne sait plus trouver la source. N’importe qui peut aujourd’hui présenter une affection respiratoire.
Le nombre de patients jeunes a-t-il lui aussi progressé ?
Non, en tout cas pas à l’hôpital. Ils sont aujourd’hui minoritaires et la plupart ne nécessitent pas de prise en charge hospitalière ; ils étaient beaucoup plus nombreux au début de l’épidémie, lorsqu’on essayait de dépister ceux qui avaient voyagé dans des clusters.
Parmi ces patients jeunes, retrouvez-vous des facteurs de risque ?
Lorsque l’on parle de patients jeunes, il faut être précis. En dessous de ans, je n’ai pas connaissance de formes sévères. Il y a quelques cas chez les adolescentes et les jeunes adultes. Nos malades âgés de à ans et atteints de forme sévère présentent souvent une obésité et/ou une hypertension.
Pensez-vous toujours que la France pourrait se retrouver dans la situation de l’Italie ?
J’ai davantage d’espoir que ce ne sera pas le cas. Même si on reçoit beaucoup de cas graves, la progression se fait à un rythme supportable, probablement grâce aux mesures de confinement. On nous annonce le pic pour la fin de semaine, au maximum jours, je veux croire que l’on s’est bien équipés et qu’on ne sera pas débordés. Je vois la lumière au bout du tunnel. Mais, il faut rester vigilant, car dans d’autres régions de France la situation reste compliquée.
PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN
ncattan@nicematin.fr