Monaco-Matin

« Nous ne tiendrons pas au niveau des finances »

Avec Noël, les fêtes de Pâques sont, en général, une En pleine crise, des artisans chocolatie­rs de toute la forte période d’activité pour eux. tirent le signal d’alarme

- P. POLETTO ppoletto@nicematin.fr

Si je ne travaille pas pour Pâques, on devra fermer. Tout arrêter. Nous ne tiendrons pas au niveau des finances. Et pourtant, nous faisons partie des magasins dits alimentair­es qui sont encore ouverts ! »

Chez Patricia et Francis, responsabl­es de La Bonbonnièr­e antiboise, le temps n’est pas à la fête (lire aussi ci-dessous). Dans leur boutique de la cité des remparts, boulevard Wilson, le couple passe des heures sans voir un client. «On parle avec les petites mémés qui passent dans la rue pour passer le temps », soufflent-ils. Et le temps leur semble très long alors que l’artisan chocolatie­r devrait être en plein boom à l’approche de Pâques. « Nous avons adapté le magasin afin de pouvoir respecter les distances de sécurité mais les clients pensent peut-être que nous ne faisons pas partie des commerces alimentair­es. Et pourtant si ! », relève Francis.

Autour de lui, il ne compte même plus les compositio­ns chocolatée­s qu’il fabrique depuis janvier pour les fêtes pascales (Pâques étant dimanche 12 avril). Plus de 500 pièces de chocolat ne trouvent pas preneur.

Depuis leur installati­on il y a 30 ans, le couple n’avait jamais connu une telle situation. Ils en ont mal au coeur. « Nous sommes de petits indépendan­ts. Si l’on perd notre clientèle dans les prochaines semaines, ce sera difficile à surmonter. Il va déjà falloir payer le loyer car le propriétai­re ne veut pas entendre parler de report. Nous avons aussi nos fournisseu­rs. Je suis conjointe collaborat­rice, je n’ai donc droit à rien. C’est vraiment très dur », commente Patricia. Face à ce stock de gourmandis­es accumulées, ils ont décidé d’en offrir aux écoles, aux crèches, aux hôpitaux.

 % du chiffre d’affaires

Même son de cloche à Maison Regel, située 39, boulevard Garnier à Nice. Installé depuis dix ans dans la cité niçoise, Jean-Marc Regel, artisan chocolatie­r-pâtissier, fait un constat alarmant. «La clientèle ? C’est très sporadique. Les gens ne se retrouvent plus en famille. Ils n’achètent plus de gâteaux, il n’y a plus d’achats pour des anniversai­res. Nous n’avons pas fermé mais la situation est inquiétant­e. » Alors que l’essentiel des compositio­ns de chocolats prévues pour les fêtes de Pâques est quasiment bouclé : « Les trois quarts des chocolats au lait sont terminés et nous avons fait un peu de chocolat noir, les ventes sont en chute libre. » Alors que cette période représente, traditionn­ellement, pour lui, 35 % du chiffre d’affaires annuel, il espère, cette année, « à maintenir difficilem­ent entre 10 et 15 %. » Face à la crise, il a dû aussi renoncer à l’embauche d’une salariée en contrat à durée déterminée qui devait assurer la vente. « Les gens sont confinés. J’ai des clients qui viennent de Nice et des environs. La question des déplacemen­ts est évidemment problémati­que. On peut assurer, à la demande, quelques livraisons. Mais j’avoue que c’est au cas par cas », termine Jean-Marc.

Le chocolat, un antistress

Dans le Var, à Hyères, Philippe Prodotti tourne et vire dans son magasin installé sur le boulevard du front de mer.

Au total, ce sont 1 500 compositio­ns et chocolats fourrés que l’artisan chocolatie­r a produits depuis le début de l’année.

Et les entrées dans son tiroir-caisse fondent à vue d’oeil. « J’avais une apprentie que j’ai dû mettre en chômage partiel. J’avais organisé une tombola pour faire gagner un oeuf géant. Tout était prêt. Pour une fois, j’étais en avance pour Pâques », soupire-t-il.

La première difficulté, selon lui, est de faire savoir que les chocolatie­rs ont l’autorisati­on d’ouvrir en cette période très réglementé­e. « C’est de l’alimentair­e et nous sommes inclus dans la liste des profession­s autorisées », insiste l’artisan.

Ensuite, il est tributaire de la réglementa­tion des déplacemen­ts des confinés. « Nos clients habituels viennent de Nice, Aix, du Lavandou, en plus de la clientèle locale. Avant le confinemen­t, nous recevions entre 10 et 15 personnes par jour. Là, nous tombons à zéro ! » . Et d’espérer que les gourmands avertis feront un crochet lors de leurs courses pour venir se faire plaisir. « Surtout que le chocolat serait un excellent antistress », ajoute Valérie, son épouse.

Newspapers in French

Newspapers from Monaco