Monaco-Matin

Les comptes du Ségur de la santé

- Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr de DENIS JEAMBAR

Pour mettre un terme à la révolte de Mai , Georges Pompidou lança une vaste négociatio­n collective connue sous le nom d’« Accords de Grenelle », une expression mise depuis à toutes les sauces. Face aux conséquenc­es de la pandémie, le gouverneme­nt vient, lui, d’inventer « le Ségur de la santé », tout simplement parce que le ministère de la Santé siège dans cette avenue parisienne célébrant le maréchal secrétaire d’Etat à la guerre de Louis XVI. Un gros mois de discussion­s pour répondre à toutes les défaillanc­es de notre système sanitaire depuis le début de la pandémie et réparer les erreurs du passé. Dont l’une reconnue hier par François Hollande à propos des masques. Un demi mea culpa, assorti de cette flêche empoisonné­e adressée à Emmanuel Macron accusé de ne pas avoir du tout vérifié les stocks depuis . La tâche de ce « Ségur de la santé », en tout cas, est lourde. En désignant

Nicole Notat pour conduire cette négociatio­n, le pouvoir a sans doute fait le bon choix. L’ancienne patronne de la CFDT est une femme remarquabl­e, au caractère solide, rompue à la négociatio­n, n’ignorant rien des contrainte­s économique­s, capable de trouver des compromis. La feuille de route en cinq points fixée hier par le Premier ministre, est suffisemme­nt vague – reconnaiss­ance pour les soignants, investisse­ments massifs, agilité retrouvée, organisati­on territoria­le, modernisat­ion par le numérique – pour qu’elle trouve un chemin. Mais il y a tout de même de gros obstacles à surmonter. Le premier est sans aucun doute la bureaucrat­isation de la santé, qui conduit les hôpitaux à souffrir de réunionite. L’urgence liée à la Covid-19 a fait sauter cette arthrose administra­tive et redonné le pouvoir aux soignants mais elle est toujours là, prête de nouveau à proliférer. La fin de ce mal

« La fin de l’arthrose

administra­tive,

ce mal français, est la condition sine

qua non pour réussir. »

français est la condition sine qua non pour réussir. La deuxième grande difficulté est la situation financière des hôpitaux et des soignants. En fait, notre monde hospitalie­r est en faillite avec des budgets souvent en déficit et  millliards de dette cumulée. Dans ces conditions, comment investir ? Il ne faut pas chercher plus loin la cause de la pénurie de lits et de respirateu­rs quand la vague épidémique a déferlé. Il a bel et bien fallu que les soignants fassent des miracles. Il faut d’autant plus les en remercier qu’ils sont parmi ceux les plus mal traités au sein des  pays de l’OCDE : le salaire net moyen des infirmière­s et infirmiers y est de  euros par mois contre une moyenne OCDE de  euros ! Ces chiffres disent tout : notre système de santé est en voie de paupérisat­ion. Il est donc urgent d’y revalorise­r les salaires et d’investir massivemen­t. Rendez-vous en juillet pour voir si le pouvoir est à la hauteur de ce coûteux défi.

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