Un concert classique ancré dans l’ère du numérique
Pour la Fête de la musique, le conservatoire a enregistré un « concert en terre insolite » adapté aux conditions sanitaires. Il sera diffusé dimanche à 11 h sur la page Facebook de la Ville
Et à la fin, c’est toujours la musique qui gagne. Le contexte sanitaire a beau – en pratique – ne pas être tellement propice aux joyeux rendez-vous, la Fête de la musique aura bien lieu à Menton. Même si elle s’invitera sous une forme très atypique.
Dans la mesure où les regroupements sur le domaine public sont encore limités à dix personnes, c’est principalement via les outils numériques que les notes atteindront en effet le public.
Un choix audacieux qui implique d’anticiper les choses.
Hier, dans la plus grande salle du conservatoire, la pianiste Isabelle Sikora et le flûtiste Guillaume Daniel se sont ainsi prêtés à un exercice difficile pour qui aime le contact humain : jouer en solitaire, avec pour seule compagnie un vidéaste – Patrick Varotto – et son matériel. Les oeuvres interprétées trouveront naturellement leur public, mais en différé. Les habitués des concerts en terre insolite et autres mélomanes étant invités à se rendre sur la page Facebook de la Ville à 11 heures, ce dimanche. Les résidents des Ehpad de la ville devraient également en bénéficier.
La flûte à l’honneur
De leur côté, les professeurs du conservatoire filmés évoquent bien volontiers un challenge. « C’est la première fois que j’enregistre de cette manière, sans retour immédiat des spectateurs », commente Guillaume Daniel. Précisant que tous deux essaient au maximum de jouer comme s’il s’agissait bel et bien d’un direct, en veillant à ne pas s’y reprendre à trois fois quand tel ou tel passage n’est pas parfait. «Le lien avec les gens nous manque mais au moins on ne joue pas chez soi. Accompagner un autre musicien à distance peut paraître simple mais dans les faits ça ne l’est pas du tout », complète Isabelle Sikora. Quant au programme du concert, il a dû être créé exprès. « Pour la première partie, nous avions envie de faire quelque chose autour des compositeurs flûtistes. Nous nous sommes ainsi intéressés à Paul Taffanel – un musicien de la deuxième moitié du XIXe siècle – puis aux oeuvres en lien », reprend Guillaume Daniel. Précisant que la deuxième partie sera, quant à elle, plus éclectique : du baroque, du classique, et même du jazz d’un compositeur contemporain.
« Nous avons avancé en véritable terra incognita, souligne le responsable du conservatoire, Paul-Emmanuel Thomas. Le numérique ne faisait pas du tout partie de notre quotidien, on ne se posait même pas la question. » Selon lui, la crise sanitaire et ses conséquences ont révélé combien le fondement était le lien. « C’est notre objectif premier, et aussi ce qui nous manque le plus – entre musiciens, et avec le public » , détaille-t-il.
« Comme pour les concerts en terre insolite (lancés après que le musée Cocteau a dû fermer), on se rend compte combien les contraintes rendent créatifs », assure de son côté l’adjointe à la Culture, Martine Caserio. Précisant que de la musique sera également diffusée dans la ville via des haut-parleurs toute la journée de dimanche. Jusqu’à 18 h, pour que les bars et les restaurants puissent ensuite prendre le relais. En dépit des contraintes, la musique entend bien entrer en résistance.