Monaco-Matin

Pauline Ducruet expose sa ligne de vêtements

Jusqu’à dimanche, la jeune designer tient un magasin éphémère dans le tunnel Riva où elle présente et vend la collection printemps-été 2020 d’Alter, sa marque de mode unisexe créée en 2018

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIBAUT PARAT tparat@nicematin.fr

Elle déplace, ici et là, les portants. Joue avec les lumières pour sublimer les vêtements accrochés dessus. A vingt-quatre heures de l’inaugurati­on de son pop-up store (magasin éphémère) au tunnel Riva, Pauline Ducruet troque sa casquette de designer de mode pour celle de chef d’orchestre. Jusqu’à dimanche, elle présente une cinquantai­ne de pièces de la collection printemps-été de sa marque Alter. Une « griffe », déjà présentée à la Fashion Week de Paris, qui se veut unisexe. Avec des pièces classiques upcyclées (recyclées pour en faire un produit haut de gamme), la fille de la princesse Stéphanie, 26 ans, a créé un vestiaire unique. Pour celles et ceux qui aspirent à s’habiller librement. Sans se préoccuper des normes de genre.

« Le tunnel Riva ne pouvait mieux coller à l’esprit de la marque. Un endroit un peu undergroun­d, abîmé par le temps mais hyper chic et très French Riviera », sourit-elle. Avec un e-shop et des pop-up store qu’elle aimerait multiplier ici et là, Pauline Ducruet entend bien positionne­r sa marque comme précurseur d’une mode durable. Entretien.

Alter, c’est l’histoire d’un coup de coeur pour une tenue masculine dans un magasin à New York. Racontez-nous.

J’ai toujours été attirée par la mode masculine et les costumes pour hommes. Je me suis toujours demandé pourquoi ils ne faisaient pas la même chose pour les femmes. Dans ce magasin, on m’a invité à aller du côté du rayon pour femmes. Mais, en réalité, si je veux acheter une tenue parce qu’elle me plaît, je le fais (rires). Alter s’adresse à tout le monde. Aux hommes, aux femmes, aux transgenre­s, aux gender fluid et non-binaires. On essaye d’inclure tout le monde, de confection­ner des vêtements pour une personne et non pas pour un genre. On ne met pas les gens dans des cases.

Un discours moderne qui reflète l’évolution de la société : de plus en plus de gens ne veulent plus s’identifier à un genre. Y a-t-il une réelle demande dans le marché du prêt-à-porter ?

De plus en plus. On n’a plus envie, en tant que petite nana, d’être habillée en talons stiletto et en petite robe courte toute la journée. On a envie d’être confortabl­e. Les normes de genre sont en train de changer. La mode doit suivre aussi.

À New York, où vous avez étudié, les mentalités sont très ouvertes sur le sujet…

Bien sûr. A New York, il y a un milieu très undergroun­d qui se fout des normes sociales et de genres. C’est là-bas que j’ai puisé une grande partie de mon inspiratio­n pour Alter. Ce sont des sujets sociaux qui me sont chers. Avec cette collection, je voulais vraiment poser les bases de mon identité, de mon esthétique en tant que designer. On retrouve beaucoup de denims (en jean, ndlr), de pièces que mes amis ou moi-même auraient portés.

J’ai repris des choses des années quatreving­t, dans des couleurs très flashy. Avec Alter, tout est dans le contraste. Il y a autant de la jolie soie italienne que du denim ou du cuir recyclé.

Avoir votre griffe, votre marque, fut-il un parcours semé d’embûches ?

Pour le côté créatif, ça a été très facile car j’ai la fibre. Pour le volet entreprene­urial, ça a été plus délicat avec l’aspect financier et administra­tif. J’ai été quasiment toute seule pour tout faire, et je n’avais pas fait d’école de business. J’ai étudié à la Parsons School of Design où j’ai plutôt appris à faire des patronages, à coudre, etc.

Votre mère avait, dans les années quatreving­t, lancé sa ligne de maillots de bain. Lui avez-vous demandé conseil au cours du processus ?

Dès que j’avais un pépin, je l’appelais pour lui demander conseil. A son époque, c’était bien différent, on pouvait lancer des marques plus facilement. Maintenant, c’est beaucoup plus compliqué.

La marque s’inscrit dans la tendance upcycling, c’est-à-dire que vous utilisez des pièces chinées. C’était important de s’insérer dans une démarche écologique ?

Ce sont des valeurs que j’essaye d’appliquer au quotidien dans ma vie, il était logique de le faire pour ma marque. Tous les jeans sont recyclés. Ils ont déjà été utilisés. On les chine dans les friperies, dans les ventes en gros. On ne fait pas de production de jeans ou de cuir, lesquels demandent beaucoup d’eau et de produits chimiques. La traçabilit­é de la soie et du coton que j’utilise est aussi très importante.

La mode est une industrie qui pollue énormément, c’est important de faire des actions qui puissent changer cela.

Votre pièce fétiche ?

Celle que je porte (voir notre photo). C’est de là où tout a commencé, que l’idée du recyclage est partie. C’est une veste en jean patchwork. C’est un petit peu la signature d’Alter.

Le confinemen­t a-t-il été propice à la créativité ?

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La mode est une industrie qui pollue ”

J’ai remanié l’Instagram de la marque ainsi que son image et l’aspect communauta­ire. J’ai aussi beaucoup dessiné pour les futures collection­s, je me suis remise au sport. À titre personnel, ce confinemen­t m’a fait le plus grand bien car je suis quelqu’un qui voyage énormément, je suis toujours à fond à droite et à gauche. C’était nécessaire de me poser. J’ai appris sur moi-même, notamment au niveau de la patience. On a fait beaucoup de balades en famille. Cela faisait très longtemps qu’on n’avait pas passé autant de temps ensemble.

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(Photo Jean-François Ottonello) Pauline Ducruet au coeur du tunnel Riva.

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