« L’écologie est au coeur de la feuille de route »
Secrétaire d’Etat à la Transition écologique, va se saisir des conclusions de la Convention citoyenne pour le climat. Elle y voit un tournant et un marqueur du quinquennat
La Convention citoyenne pour le climat, constituée après le Grand Débat national à partir de 150 personnes tirées au sort, tient, à partir d’aujourd’hui et jusqu’à dimanche, sa session conclusive. Emmanuelle Wargon, secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique [Elisabeth Borne], qui fut par ailleurs avec Sébastien Lecornu la coanimatrice du Grand Débat national, pense que ce sera «un marqueur fort » du quinquennat et de la volonté du gouvernement de faire de l’écologie «lecoeur de sa feuille de route ». Elle nous a fait part de son enthousiasme.
Qu’attendez-vous de cette remise des travaux de la Convention citoyenne ?
J’en attends beaucoup !
C’est un exercice démocratique totalement inédit. Ces citoyens ont travaillé durant presque un an sur nos grands sujets écologiques : se loger, se déplacer, produire, se nourrir, consommer. Leurs propositions vont nous aider à accélérer notre transition écologique. C’est une forme très innovante de démocratie, dont le défi a été relevé haut la main, malgré le scepticisme du début. Elle traduit une volonté d’être moins vertical qu’à l’entame du quinquennat. Et elle va se poursuivre avec la volonté du Président de travailler davantage avec les corps intermédiaires et d’aller plus loin en matière de décentralisation et d’initiatives locales. Cette
‘‘ Convention est un marqueur d’une méthode plus collective, plus « terrain ». Nous sommes à un moment positif pour l’écologie, qui est au coeur de la feuille de route présidentielle. Elle n’est plus à part, mais au centre d’un projet économique, écologique et solidaire. Je crois que c’est un moment dont on se souviendra collectivement.
Comment les propositions seront-elles ensuite triées et mises en oeuvre ?
Lors de l’installation de cette Convention l’an dernier, le chef de l’Etat s’était engagé à transmettre ses propositions sans filtre au Parlement ou à les soumettre à référendum. Il va, évidemment, tenir sa promesse et les propositions seront donc soit traitées par la voie parlementaire, soit soumises pour tout ou partie à référendum.
C’est un choix qui lui appartiendra. À côté de cela, nous avançons bien évidemment déjà sur divers sujets, dont celui de la rénovation thermique des bâtiments, auquel nous intégrerons les suggestions de la Convention citoyenne.
L’amélioration énergétique des bâtiments, on a l’impression d’en entendre parler depuis des lustres. Comment va-t-elle s’accélérer désormais ?
Il est vrai que c’est un sujet qui figure dans les priorités publiques depuis longtemps. Il est vrai aussi que l’on peut faire mieux. Mais nous avons déjà beaucoup changé les choses en : nous avons aidé personnes à isoler leur maison et presque à changer de chaudière, soit trois fois plus qu’en . On peut donc dire que cette politique est en train de décoller. Et, depuis le er janvier, nous avons lancé un dispositif plus simple, Ma prime rénov, qui a généré une forte accélération du dépôt des dossiers. La Convention va nous inciter à aller plus loin en matière de rénovations globales qui amènent les logements à un bas niveau de consommation énergétique. Nous y travaillons.
« La crise va être un moment de vérité pour l’ambition écologique », avez-vous récemment déclaré. Quelle sera donc la feuille de route générale du gouvernement ?
C’est un moment de vérité dans le sens où l’on se dit qu’il faut reconstruire notre économie après cette crise, mais en plaçant l’écologie au coeur de cette reconstruction. Dimanche, Emmanuel Macron a parlé d’une « reconstruction économique, écologique et solidaire qui sera la clé de notre indépendance ». C’est une réponse claire à votre question : l’écologie n’est ni facultative ni périphérique, elle est au centre de la relance. La crise est même un accélérateur de notre ambition écologique. Nous entrons maintenant dans le coeur du réacteur, avec par exemple un effort significatif en faveur des véhicules électriques, un travail sur les avions du futur qui seront moins lourds et moins polluants, la fermeture de lignes aériennes pour lesquelles existe une alternative ferroviaire à deux heures et demie maximum. Nous avons des objectifs très ambitieux pour les deux prochaines années.
Un point pratique sur les primes d’acquisition de véhicules propres. Quelles sont-elles à présent ?
La prime pour l’achat d’un véhicule électrique est passée à €. Celle pour l’achat d’un véhicule hybride est de €. Peut s’y ajouter la prime à la casse d’une ancienne voiture, qui se monte, elle, à €. Cette prime à la casse vaut aussi, à raison de € cette fois, pour l’achat d’un véhicule récent essence ou diesel, sous réserve d’émissions de CO correctes.
On voit fleurir dans presque toutes les communes des pistes cyclables qui sont souvent supprimées quelques jours plus tard. Comment ne pas confondre vitesse et précipitation, tout en répondant aux besoins ?
Il faut être volontariste pour installer des pistes cyclables, car il existe une vraie attente des Français. Nous assistons à une hausse
‘‘ très nette de l’usage du vélo, en particulier dans les grandes villes. La prime que nous avons mise en place pour aider à la réparation de son vélo marche également très bien. La demande est là. Il faut, bien sûr, veiller à un partage équilibré de l’espace. Quand on met en place une piste cyclable très rapidement, cela peut poser des problèmes aux piétons et aux automobilistes. Des réglages fins locaux sont donc nécessaires. Mais de façon générale, nous avons besoin de plus de pistes cyclables qui permettent d’assurer une partie des transports du quoditien.
Comment comptez-vous développer les circuits courts, y compris en les rendant plus accessibles économiquement ?
Il faut d’abord encourager les cultures maraîchères à proximité des grandes villes. A Amiens par exemple, dans le cadre du contrat de transition écologique, nous finançons avec la Ville et le Pôle métropolitain l’implantation de fermes maraîchères en périphérie au service des habitants.
Une fois les producteurs réinstallés, ceux-ci travaillent parfois en bio mais aussi en agriculture conventionnelle ou mixte, ce qui permet d’avoir des produits à tous les prix et très abordables, surtout quand la vente se fait par des marchés de producteurs qui suppriment les intermédiaires. Par ailleurs, la loi née des états généraux de l’Alimentation impose désormais aux cantines scolaires un approvisionnement soit en bio soit en circuits courts, ce qui s’avère structurant en créant à la fois de la demande et des débouchés. Nous allons continuer à accélérer en ce sens.
La volonté affichée par l’exécutif de réindustrialiser la France va, de fait, engendrer de la pollution. Comment sera-t-elle contenue ?
Il y a plusieurs manières d’y parvenir. D’abord en ayant une industrie de plus en plus décarbonée, ce qui est l’un de nos grands objectifs dans toutes les filières industrielles. On remplace de la chaleur au fioul, au charbon ou au gaz par de la chaleur plus durable. On fait de la récupération de chaleur dite « fatale » pour d’autres usages, industriels ou urbains. On fait aussi brûler des déchets industriels pour chauffer. Nous avons des schémas dans lesquels l’industrie peut produire la même quantité avec beaucoup moins d’émissions de gaz à effet de serre. L’autre réponse sera le projet européen de taxation carbone aux frontières. Aujourd’hui, quand on achète des produits industriels, ils émettent du CO qui a été produit ailleurs. Mais le CO émis en Chine a autant d’impact sur le climat que celui émis en France. Les catastrophes naturelles sont liées aux dérèglements climatiques mondiaux. Le jour où cette taxation sera mise en place, on rendra plus compétitive l’industrie européenne tout en réduisant l’impact net des émissions mondiales.
La crise est un accélérateur de notre ambition écologique”
Encourager les cultures maraîchères périphériques”