Monaco-Matin

Aux sommets de son art

Traileur depuis dix ans, le Niçois Christophe Tiéran a réalisé un challenge fou : rallier les sept plus haut points du Mercantour en courant. Le tout en moins de 40 heures !

- VIVIEN SEILLER

Il est arrivé au bout de son défi. Au bout de lui-même et de ses douleurs. Mercredi soir, Christophe Tiéran a atteint le village de Belvédère et bouclé son pari fou : enchaîner les sept sommets de plus de 3000m du massif du Mercantour en courant au départ d’Allos. Un menu de glouton avec 150 kilomètres à parcourir et 10 500 mètres de dénivelé positif à avaler en gravissant le Mont Pélat (3051m), le Cimet (3020m), le Mont Ténibre (3031m), le Mont Corborant (3007m), la Cime du Gélas (3143m), la Cime de la Malédie (3059m) et enfin le Mont Clapier (3045m). Le Niçois de 37 ans s’était fixé une limite horaire de 34 heures et a finalement bouclé le tout en 38 heures.

« On était au-dessus des 2500m d’altitude moyenne donc il y a un manque d’oxygène et ça se ressent, lâche-til au bout du fil. Il faut boire et manger beaucoup plus que d’habitude.»

L’ultra-trailer s’était entraîné dur. Il s’était préparé avec intensité malgré les longues semaines de confinemen­t.

« J’ai fait des séances d’entraîneme­nt en altitude mais il faut plusieurs années pour arriver à faire des distances pareilles. En plus, la neige est très présente donc il faut faire des reconnaiss­ances sur les sommets pour voir quel matériel est nécessaire.»

Harmonica, brouillard et nausées

Préparateu­r physique, préparateu­r mental, ostéopathe, cameraman... Ce grand supporter de l’OGC Nice a pu compter sur un staff d’une quinzaine de personnes pour l’épauler entre le départ d’Allos, mardi matin à 6h, et l’arrivée à Belvédère, mercredi peu avant 20h. Certains ont même parcouru quelques kilomètres avec lui pour l’accompagne­r sur de petits tronçons. De quoi lui laisser des souvenirs impérissab­les. « Deux personnes m’attendaien­t sur un sommet et l’un d’eux a joué un morceau d’harmonica quand je montais. C’était un sacré moment d’émotion, je ne m’y attendais pas. Quand on entend de la musique alors qu’on est en train d’escalader dans le brouillard, ça fait chaud au coeur.»

Forcément précieux pour tenir le coup jusqu’au bout. « J’ai dû m’arrêter quatre heures sur le parcours pour me reposer un peu. Je n’ai plus réussi à m’alimenter en fin de nuit, j’ai saturé au niveau du sucre et en me relevant j’avais une perte d’équilibre et des nausées. J’ai appelé mon osthéo qui est venu une heure après, j’avais un blocage au niveau du foie et de la vésicule biliaire. Il m’a remis d’aplomb.»

Des pierriers à négocier

Hormis ce contretemp­s et malgré quelques ongles de pied en sang, le maçon installé à Roquebilli­ère a parfaiteme­nt géré sa course avec les difficulté­s qu’elle impliquait. A commencer par la technicité du terrain. « Il y avait énormément de pierriers. J’ai pris des pierres sur la malléole en descendant dans des éboulis. » Suffisant pour le faire douter ? « Non, parce que je m’étais préparé pour arriver au bout. Quand je n’arrivais plus à manger j’ai essayé de ne pas m’affoler en me posant les bonnes questions. Le staff était plus inquiet que moi, je me suis dit qu’on allait trouver les solutions.» Au lendemain de sa (longue) traversée, Christophe Tiéran avait déjà rangé ses baskets et retrouvé les chantiers pour reprendre son activité profession­nelle. «Jen’aipas le choix, je suis à mon compte et j’ai du boulot par dessus la tête. C’est fini les vacances », se marre-t-il, conscient qu’il vient d’ajouter une brillante ligne de plus sur son CV d’ultra-trailer

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(Photo DR) Christophe Tiéran : pari (fou) réussi.

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