« C’était comme vivre un état de guerre pour la jeune infirmière que j’étais ! »
« Je n'avais que trente ans, installée comme seule infirmière dans le village des Verriers. Je ne pensais pas commencer une carrière dans un état… de guerre .»
Francine Bégou-Piérini, aujourd’hui retraitée et engagée associativement pour la défense de l’environnement, se souvient comme si c'était hier du festival de qui a marqué sa vie professionnelle.
« Biot était envahi par des milliers de jeunes, pour certains déjà bien malades à peine arrivés ! Ils étaient venus au moins dix jours avant le concert pour avoir une place sur le site. Ils descendaient au village pour se laver nus dans la Brague ou encore dans les fontaines. » Des scènes inédites pour les villageois, cois. « Certains hippies avaient même pris possession du lavoir derrière l'église. Bioitois et Bioitoises ont crié au scandale et au sacrilège ! Mais n’ont pas tous fermé les yeux devant ces jeunes gens dévêtus .»
La révolution sexuelle sous les fenêtres.
« Devant cet afflux massif de jeunesse, le maire Eloi Monod a demandé qu'une cellule de Médecins sans frontières soit installée. » Et à en croire l’ex-soignante, cela a su être fort utile : « Je ne connaissais pas les méfaits de la drogue. Heureusement, j'ai eu la chance d'avoir à mes côtés le professeur Bernard Kouchner. Il m'a donné tous les conseils pour prendre en charge ceux qui prenaient n’importe quelle substance mais aussi ceux atteints de maladies vénériennes .» Ambiance.
Injections entre deux portes de sa Citroën
« J’ai donc injecté une trentaine d’antibiotiques par jour. Je faisais les piqûres entre les deux portes de ma Citroën, une Ami 6. J’ai même fait du covoiturage avec eux car il fallait qu’ils se ravitaillent pour manger. Le système D a fonctionné tout comme la rapine. » Une vingtaine de jours plus tard, chacun a regagné ses pénates. Et pour certains, leur vrai visage : « Nous avons vu arriver un grosse Mercedes avec quatre hommes à bord, costumés. Ils se sont déshabillés et ont enfilé des vêtements pour la circonstance. Comme quoi ! » Il faut dire que voir Joan Baez en concert, ce n’est clairement pas courant. « Lorsqu’elle a commencé à chanter, tout le monde a allumé son briquet. C’était une folie car la végétation était sèche en ce mois d’août. » Fort heureusement, le feu n’a pris que dans les coeurs ce jour-là.
Francine Bégou-Piérini.