Monaco-Matin

Crise sanitaire : « Un gros manque d’anticipati­on »

Covid-19, sécurité après les violents incidents, notamment à Nice, mais aussi élections départemen­tales, le député LR des Alpes-Maritimes Éric Ciotti commente sans concession­s

- STÉPHANIE GASIGLIA

C’est la pause estivale pour le député Éric Ciotti. La commission d’enquête sur les conséquenc­es de l’épidémie de Covid-19, dont il est le rapporteur à l’Assemblée, a interrompu ses travaux. Reprise en septembre et rapport attendu pour décembre. Mais le patron de la fédération LR des Alpes-Maritimes est, lui, loin d’être en vacances : sénatorial­es à plier en septembre, et départemen­tales à préparer pour 2021 : un numéro d’équilibris­te qu’il réalise avec l’« autre LR », Christian Estrosi, à la faveur d’une entente – officielle­ment – retrouvée.

Quel point d’étape pouvez-vous faire après deux mois de travail de la commission d’enquête sur le Covid- ?

Au terme des deux premiers mois, on peut clairement affirmer que cette crise a été très largement mal anticipée. Et ce depuis , après la forte mobilisati­on sous la présidence de Nicolas Sarkozy face à la grippe HN, on a baissé la garde.

Sur les masques notamment ?

En  nous avions un stock de  milliard  millions de masques. Plus que  millions au er janvier . Et toujours

 millions au pic de la crise sanitaire fin mars. Ce gros manque d’anticipati­on, on le retrouve aussi dans le discours du gouverneme­nt. Au début, le masque était inutile voire dangereux pour le gouverneme­nt. Et aujourd’hui, son port est obligatoir­e. Compte tenu de cela, je propose que le coût soit pris en charge par l’Etat ou par l’assurance-maladie, pour les plus de  ans, par exemple.

D’autres carences dans la gestion de la crise ?

On a le sentiment qu’à chaque fois on avait un temps de retard en France : pour la fermeture des frontières notamment avec les voisins italiens, par exemple.

Et ce chiffre ahurissant : les deux premières semaines de la crise la France n’a réalisé que   tests, alors que l’Allemagne en faisait  .

Certaines collectivi­tés ont été en première ligne contre le Covid...

Oui et heureuseme­nt. Les collectivi­tés locales ont fait preuve de souplesse, de réactivité et de proximité avec les acteurs de terrain. Encore aujourd’hui. D’ailleurs, le Premier ministre a annoncé la mise à dispositio­n gratuite de masques pour les personnes vulnérable­s. Le conseil départemen­tal des AlpesMarit­imes

n’a reçu aucune informatio­n à ce jour, donc c’est nous qui enverrons les masques, aux personnes vulnérable­s et notamment à nos   allocatair­es du RSA.

Combien a coûté la crise sanitaire à la collectivi­té départemen­tale ?

Vingt millions d’euros,  millions en aides économique­s pour le fonds de la CCI et celui de la Région. Le reste en masques, mais aussi en équipement­s pour protéger les profession­s libérales, les commerçant­s et les artisans. Et pour mettre en place des équipes de tests mobiles.

Vous envisagez d’augmenter la fiscalité pour compenser ?

C’est un choc budgétaire, oui, mais nous n’augmentero­ns pas la fiscalité. Grâce à notre bonne gestion avec le président Ginésy, nous avions une réserve de  millions sur l’exercice .

Et il semblerait que le marché de l’immobilier reprenne sa dynamique : comme nos premières recettes proviennen­t des droits de mutation, cela nous permet d’atténuer les conséquenc­es de la crise. Nous savons que l’épidémie aura des conséquenc­es pour beaucoup de familles azuréennes : ce serait la pire des choses que d’alourdir le fardeau fiscal. Au contraire, les foyers azuréens vont bénéficier de la baisse votée fin .

Vous vous attendez à une rentrée compliquée ?

Le choc est rude et d’une violence inédite pour les Alpes-Maritimes car notre activité est très liée au tourisme et au trafic aérien. Le chômage a augmenté de  % dans notre départemen­t depuis un an, alors qu’il a augmenté de  % au niveau national.

Plus de   morts en France du Covid dont   pensionnai­res d’Ehpad : que dit la commission à ce sujet ?

Sur ces plus de  ,   sont morts en Ehpad sans être hospitalis­és. Les Ehpad ont été les parents pauvres de la crise, il faudra en tirer toutes les conséquenc­es. Je pense que le modèle actuel de ces établissem­ents est à revoir. Il faut aller vers des unités de médicalisa­tion beaucoup plus forte. En période normale, sans le virus,  % des patients de réanimatio­n ont plus de  ans. Tout début avril, on est tombé à  % et même,  % en Île-deFrance. Une régulation s’est clairement opérée au détriment des personnes âgées dépendante­s.

Notre système de santé a-t-il été à la hauteur de l’ampleur de la crise ?

On nous a dit que notre système de santé avait tenu, mais il a tenu grâce à la formidable mobilisati­on des soignants ! Il ne faut pas cacher aux Français qu’il a tenu aussi grâce à la déprogramm­ation massive des actes médicaux, hors Covid, notamment des traitement­s de lutte contre le cancer. Sans parler des actions de dépistage dont on verra les conséquenc­es à long terme.

Sur le front de la sécurité, Éric Dupond-Moretti a dit qu’il était favorable à la reprise de votre loi sur l’encadremen­t militaire des mineurs délinquant­s...

Et j’ai été agréableme­nt surpris. Cette loi adoptée en  sous Sarkozy a été inappliqué­e par Taubira : elle a coupé tous les financemen­ts. On voit bien aujourd’hui que la délinquanc­e des mineurs n’est pas sanctionné­e comme elle le mériterait. Il y a quasiment une impunité. Il faut une réponse rapide et dissuasive. Ce « service citoyen » est, je le crois, utile et pertinent. Je suis plus inquiet, en revanche, sur les annonces du garde des Sceaux en matière de politique pénale, notamment sur la dimension de la population carcérale.

Elle a baissé pendant l’épidémie ?

Depuis le er mars, elle a diminué de   détenus et la montée de violence que l’on constate depuis, y compris très fortement dans les villes du sud, n’est pas étrangère à cela... Il faut aussi avoir le courage de dire que l’explosion de délinquanc­e est liée à l’augmentati­on de l’immigratio­n. Les règlements de compte à Nice ou à Dijon entre communauté­s ethniques sont aussi la conséquenc­e du laxisme migratoire.

Depuis un mois, les visites et les annonces gouverneme­ntales se sont multipliée­s dans les Alpes-Maritimes...

Les annonces vont dans le bon sens, notamment la prime de fidélisati­on, tout en souhaitant qu’on l’accorde à tous les policiers des Alpes-Maritimes. Mais je me méfie des effets d’annonce médiatique­s. Castaner avait promis  policiers, ils ne sont pas là, pire, en un an, avec les départs, on est à moins  policiers. Gérald

Darmanin a eu raison de reprendre le terme d’ensauvagem­ent que j’ai utilisé avant lui, mais en la matière les mots ne suffisent pas, il faut des actes !

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(Photo Eric Ottino)

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