L’ancienne maison de Georges Simenon est à vendre
Dans le Haut-de-Cagnes, « la plus petite maison de la Côte d’Azur », qui a appartenu à l’écrivain, cherche un acquéreur. Estimée à 120 000 euros, ces 25 m2 regorgent d’anecdotes de l’époque
Il la décrivait comme «lapluspetite maison de la Côte d’Azur » .Petite par sa taille, assurément, mais grande par son histoire. Puisque son acquéreur le plus connu ne fut personne d’autre que Georges Simenon, lui-même.
Le père du commissaire Maigret a acheté, en 1956, ce cocon de 25 m2 perché dans la montée de la bourgade, au Haut-de-Cagnes. Comme cadeau d’anniversaire pour sa deuxième femme, Denyse. Depuis le début de l’année, cette minuscule propriété est à vendre. Le prix ? 120 000 euros.
Rachetée, sans même la visiter
L’actuelle propriétaire l’avait ellemême achetée, en 1988, à Denyse Simenon. Fait assez incongru : l’acquéreuse de l’époque n’a pas pris la peine de la visiter !
« Qu’elle ait appartenu à l’écrivain lui a suffi pour l’acheter directement. Elle en a fait une maison de vacances », relate Emmanuelle Minassian, l’agent immobilier en charge de cette vente.
À l’intérieur comme à l’extérieur, les vestiges de l’époque Simenon sont toujours visibles. Les mêmes qu’évoquent l’auteur dans son ouvrage, Mémoire intimes.
« J’avais commandé à un forgeron passionné de son art, comme la plupart des forgerons, une rampe dans laquelle figurait la lettre D », peut-on lire à la page 396. D comme Denyse. Entre deux grappes de raisins, les initiales de son amour de l’époque sont intactes. Écrivain compulsif, le père du commissaire Maigret avait fait une promesse à sa « princesse ». Celle de ne pas taper une seule ligne, sur sa machine Underwood à rubans, lors de leurs séjours dans le village médiéval. La légende dit qu’il aurait tenu sa parole. Aujourd’hui, quand on pousse la porte de la demeure, on tombe face à face avec un portrait du romancier, accroché sur la cheminée. Pipe au bec, lunettes vissées sur le nez, Georges Simenon scrute les visiteurs. Cette même cheminée qui, si l’on en croit ses écrits, a bien failli raser la maison.
« Une seule fois, D. a manifesté le désir de passer la nuit dans “sa” maison. C’était en hiver. J’avais téléphoné au restaurateur d’en face de faire allumer un feu dans la cheminée. Lorsque nous sommes arrivés, dans la nuit, les pompiers barraient la ruelle. On avait allumé un feu trop généreux et la cheminée avait brûlé ainsi qu’un morceau du plafond », retranscrit-il dans Mémoires intimes.
Fait du hasard ou non, aujourd’hui, l’agence immobilière a baissé le prix de vente car il y a de gros travaux à réaliser, au niveau de la toiture… Dans le salon qu’il appelait la « pièce vaste », une oeuvre de son « vieil » ami Marcel Vertès trône toujours au mur.
Ce dernier était un « fidèle des soirées et des nuits souvent folles de la place des Vosges ».
Un fil pour sonner le restaurant d’en face
Au fond du salon, se trouve la cuisine. « Les meubles ont été conçus, en vieux style provençal, par un ébéniste de la région. Un grand bar occupait le fond de la pièce, couverte en partie par une profonde mezzanine où se trouvaient le lit et la salle de bains », décrit-il dans son livre. Quand le couple recevait, Aline Pellegrini, une amie hôtelière, « était informée en temps voulu et remplissait le réfrigérateur pour qu’ils n’aient aucun souci d’intendance », écrivaiton dans un article publié dans nos colonnes en 1989. L’écrivain belge, lui, raconte une autre anecdote culinaire.
« Enfin, un fil qui passait par-dessus la ruelle commandait une sonnerie dans le restaurant d’en face et nous permettait de manger dans un recoin moelleux ».
De cette propriété lilliputienne, Georges Simenon voguera vers les hauteurs de Cannes dans une flamboyante villa. Avant de finir ses jours dans une propriété en Suisse de 26 pièces.