L’initiation au soufflage du verre
Il fait 38 degrés à l’extérieur et 1 120 à l’intérieur du four... Nous avons bravé la fournaise de la Verrerie Didier Saba à Antibes pour essayer cet art ancestral. Grand bien nous en a pris !
La profession est aussi magique que mystique. Inventé par les Phéniciens, le métier de souffleur de verre existe depuis des siècles. Il nécessite un savoirfaire authentique qui, dans la famille Saba, se transmet de génération en génération. Pour Didier Saba, chef de sa propre verrerie à Antibes, il est important de faire oeuvre de pédagogie autour de son métier.
C’est dans cet esprit qu’il a embauché son apprenti, Victor, et qu’il a créé des séances d’initiation pour le grand public. Hugo se lance le premier. Ce petit garçon de 10 ans est venu s’essayer au soufflage du verre : « Je voulais voir comment on fabriquait ce qu’il y a en boutique. » Il n’a pas peur de se brûler. Même s’il est impressionné lorsque la boule de verre bouillante arrive sur sa main au moyen d’un journal détrempé. Quand il doit souffler dans la canne, Didier Saba s’amuse : « Il faut arrêter de fumer Hugo ! »
Étonnamment léger
Trêve de plaisanteries, voici venir notre tour ! J’ai choisi de confectionner un verre à boire turquoise. Didier sort une boule de verre de son premier four à 1 120 degrés. On dirait du miel incandescent. Je prends ensuite la canne avec lui pour la rouler dans une poudre pigmentée qui va donner sa couleur au verre. C’est étonnamment léger. Moi aussi, j’ai le droit de tenir la boule de verre surchauffée dans ma main. Bizarrement, on ne ressent rien. Le journal, qui a trempé dans l’eau plusieurs jours, fait office de gant. Je monte ensuite sur un escabeau – la canne est longue – pour forger la forme du verre dans un moule. Il faut alors tailler le fond du verre à l’aide d’une pince. Les étincelles frôlent notre bras. Impressionnant.
Le coeur sur la main
Avec le Covid-19, il a fallu s’adapter. Pour respecter les normes sanitaires, Didier Saba a apposé un embout de chicha, sur la canne, qu’il change pour chaque personne afin que tout le monde puisse souffler en toute sécurité. Quand on souffle justement, la sensation est assez étrange : on n’a pas l’impression d’être très efficace ; cela me donne envie de rire ! Notre expérimentation touche à sa fin. Didier enfourne notre verre dans un autre four à 500 degrés, la température clé pour qu’il garde sa forme
Même si son grand-père était déjà verrier, Didier Saba avait d’abord choisi une tout autre voie : il a commencé sa carrière en tant que journaliste et animateur radio. Puis, à ans, après l’armée, lassé de la vie parisienne, il a décidé de rentrer dans le Sud. C’est là qu’il a commencé à apprendre le métier de souffleur de verre. Son père lui a transmis les bases.
Il a ensuite voulu qu’il aille faire ses armes ailleurs. Didier Saba a alors appris aux côtés de Patrick Lepage. Puis, en , il a ouvert sa propre verrerie. Il travaille aujourd’hui à Antibes avec son apprenti et sa et n’éclate pas à l’intérieur. Didier Saba a également le coeur sur la main, au sens propre comme au figuré : pendant le confinement, il a fabriqué des centaines de petits coeurs en verre qu’il a distribués à la Croix-Rouge, au personnel hospitalier, à la police, aux pompiers... Quant à nous, pour voir notre verre terminé et le récupérer, il faudra attendre 24 h afin qu’il refroidisse correctement : le verre a ses raisons que les saisons ignorent.
On dirait du miel incandescent
Verrerie Didier Saba. 27, boulevard d’Aguillon, à Antibes. Tarif : 15 € la séance d’initiation au soufflage du verre. Rens. 07.84.05.60.56. www.saba-verrerie.com femme. Celle-ci s’occupe de toute la partie vente et lui souffle des inspirations.
À l’affût des tendances, elle explique :
« J’adore la déco, je suis complètement dans mon élément. » Victor est lui aussi très heureux de travailler avec Didier : «Ilasoncaractère, je l’apprécie », s’amuse-t-il. Didier, qui a laissé traîner une oreille, précise avec facétie : « Nous sommes comme des chefs cuisiniers, on a des caractères forts, on crie parfois. » Mais Didier d’ajouter : « J’aime ce métier parce que ce n’est jamais pareil. Toutes les pièces sont uniques et il faut sans cesse se réinventer. »