Handicapée et masquée, elle se fait verbaliser
Alors qu’elle faisait ses courses au marché, Sylvie a écopé d’un PV de 11 euros parce qu’elle portait un masque à visière plastique plutôt que textile. Sur son fauteuil, elle ne décolère pas
Tétraplégique à la suite d’une chute d’escalier il y a une douzaine d’années, Sylvie Rubinstein, 55 ans, officiellement handicapée à 85 %, se réjouissait pourtant de retourner faire ses courses au marché, à Cannes, hier matin, pour la première fois depuis le confinement.
Et si elle porte un masque FMP8 à mentonnière et visière plastique qui remonte jusqu’au-dessus des narines, ce n’est certainement pas, assure-t-elle, pour jouer la VRP de son fils Richard Mangel, importateur (depuis la Chine) de ce type de protection destinée aux métiers de bouche notamment. Mais bien parce que cet équipement est le plus adapté à son handicap, alors qu’elle dit souffrir d’insuffisance respiratoire et doit faire avancer son fauteuil roulant à la force des bras.
« J’étais toute contente de retrouver mes maraîchers après six mois, mais ce n’est pas possible avec un masque en tissu, qui m’essouffle trop, soupire l’intéressée. Que le masque FMP8 soit commercialisé par mon fils ou un autre peu importe, car je n’ai pas le choix. Depuis mon accident, j’ai beaucoup moins de capacité pulmonaire ». Malheureusement pour elle, un policier municipal en faction à Forville en a jugé autrement. Le ton est monté, et Sylvie a fini par écoper d’une amende de 11 euros pour non-port du masque réglementaire. « Je suis furieuse, dégoûtée, écoeurée. Le pire, c’est que le policier m’a tendu son stylo pour signer le PV : avant, je l’ai désinfecté, s’indigne encore Sylvie.
« Une proie facile »
« Tout l’été, la police a laissé des tas de gens sans masque, ou avec un bout de tissu sous le menton, s’entasser sur les plages et dans les restaurants, alors que moi, je suis une proie facile ». Sylvie entend « écrire au procureur et au maire ». Son fils, Richard Mangel, n’est évidemment pas le dernier à
prendre sa défense.
« Le masque FMP8 est utilisé par tous les métiers de bouche en Asie. Je reviens également de Bretagne, où tout le monde porte ce type de masque sur le marché, et les gendarmes ne verbalisent pas. Que ce soit pour ma mère ou
une autre personne, je ne vais pas en rester là ». Quant à Sylvie, contrairement au slogan affiché au fronton de Forville, sa mésaventure ne lui a donné ni la pêche ni la banane.