Monaco-Matin

« Etre maire d’un village, c’est un sacerdoce ! »

Réunie hier à Nice, l’Associatio­n des maires maralpins a déploré la tutelle financière de l’État sur les collectivi­tés et les embûches qu’il met sur leur chemin, à rebours des discours vertueux

- THIERRY PRUDHON

Les années passent et les mêmes discours repassent. « Nous avons toujours d’énormes problèmes », entame Honoré Colomas, président pour quelques semaines encore de l’Associatio­n des maires des Alpes-Maritimes, bien qu’il ne se soit pas représenté en mars à la mairie de Saint-André-dela-Roche, qu’il dirigeait depuis… 1971. « L’État s’appuie sur nous quand ça l’arrange. Mais le reste du temps, malgré ses beaux discours, il nous met surtout des bâtons dans les roues », enchaîne Denise Leiboff, maire de Lieuche, en guise de résumé du désarroi persistant des édiles. Réunis hier à Nice SaintIsido­re pour préparer leur Salon des maires du 2 octobre, une vingtaine d’entre eux ont de nouveau mis le doigt là où ça fait mal.

Une perte d’autonomie

Leurs préoccupat­ions restent d’abord financière­s. Certes, la baisse des dotations s’est calmée et les collectivi­tés locales sont compensées par l’État de la suppressio­n de la taxe d’habitation. Mais c’est un système qui ne les rassure pas, loin de là.

« Les dotations ne sont plus réduites, constate Jean-Paul David, maire de Guillaumes et président de l’Associatio­n des maires ruraux azuréens, mais la suppressio­n de la taxe d’habitation nous a fait perdre en autonomie financière, la dotation compensato­ire de l’État pouvant diminuer d’une année sur l’autre. Or, pour mener à bien nos projets, il faut que nous puissions compter sur une visibilité et une continuité des recettes. » Certains maires sont d’autant plus inquiets que l’État a tout de même supprimé le remboursem­ent de la part de la taxe d’habitation qui était dévolue aux syndicats intercommu­naux à vocation multiple [le départemen­t en compte trois]. Et que, dans le cadre du plan de relance, les communes françaises sont aujourd’hui menacées d’une nouvelle ponction de 3,3 milliards dès 2021. « L’État rétablit ainsi une forme de tutelle sur les collectivi­tés dont les ressources dépendront de plus en plus de sa seule décision », s’est ainsi alarmé hier l’Associatio­n des maires de France dans un communiqué national.

« Trop d’obstacles »

Les maires maralpins pestent, en second lieu, contre un État qui les corsète davantage en matière d’urbanisme, au motif de ne pas surimpermé­abiliser les sols.

« Les contrainte­s administra­tives se font de plus en plus pesantes, on nous supprime des possibilit­és de construire, alors que nous avons besoin de développer nos villages. Il faudrait plus d’intelligen­ce et de différenci­ation de la part de services de l’État qui nous traitent un peu trop comme des incompéten­ts », pose Jean-Paul David. Roger Ciais, maire de Touëtsur-Var,

d’illustrer : « Entre 2010 et 2016, neuf permis de construire ont été délivrés sur ma commune. Aujourd’hui, avec les nouvelles règles, sept ne pourraient plus l’être. » Bref, les maires aspirent à plus de souplesse, de pragmatism­e et de respect. « Redonnez-nous de l’oxygène », plaide Denise Leiboff, qui évoque « un mur des services de l’État ». Gérald Lombardo, premier magistrat du Rouret, abonde : «Il y a trop d’obstacles, trop de normes, il faut une ténacité énorme pour être maire aujourd’hui. » Toutes ces doléances, les maires les exposeront une nouvelle fois au préfet, lors de leur Salon du 2 octobre

au palais Acropolis à Nice. Un rendez-vous pour l’instant maintenu, malgré les contrainte­s financière­s et logistique­s imposées par la crise sanitaire : « Il est important pour les maires novices de rencontrer des collègues, ainsi que les partenaire­s institutio­nnels ou privés des mairies qui seront présents à ce Salon, il n’existe en effet pas d’école des maires », expose JeanPaul David. Et Joseph Segura, maire de Saint-Laurent-du-Var, compatit : « Etre maire d’un village, c’est un sacerdoce ! »

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(Photo Th. P.) Les élus maralpins présents hier à Saint-Isidore pour préparer leur Salon du  octobre.

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