Agnelet libéré : « Un vieux monsieur un peu perdu »
A 82 ans, il a obtenu sa libération pour raisons médicales. Condamné à 20 ans de réclusion pour le meurtre d’Agnès Le Roux, il en aura passé près de douze incarcéré. Entretien avec son avocate
Bientôt libre. À 82 ans, Maurice Agnelet s’apprête à quitter l’univers carcéral. Il l’aura côtoyé onze ans et neuf mois au cours d’une vie chaotique, marquée par l’une des plus célèbres énigmes criminelles de la Côte d’Azur. Condamné à 20 ans de réclusion pour le meurtre d’Agnès Le Roux, l’ancien avocat, radié du barreau de Nice, voit s’entrouvrir les portes de sa cellule pour raisons médicales. Plus de six années ont passé depuis sa condamnation par la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine. La disparition d’Agnès Le Roux, elle, remonte à 1977. Le corps de la jeune héritière du Palais de la Méditerranée n’a jamais été retrouvé. Son amant a toujours nié l’avoir tuée. La justice en a conclu autrement. Maurice Agnelet était libérable en mai 2024. Le 8 septembre dernier, le tribunal de l’application des peines de Caen lui a accordé une suspension de peine dès à présent. Entre autres obligations, il a interdiction de parler à la presse. Me Katia Gabriel, qui a plaidé sa libération au côté de Me François Saint-Pierre, a, en revanche, répondu à Nice-Matin.
Dans quel état physique se trouve Maurice Agnelet, et en quoi celui-ci justifie-t-il une remise en liberté ?
C’est une personne qui a un âge avancé, ans, qui a des problèmes de santé variés, et dont la lucidité est altérée. On est face à un monsieur qui vieillit, qui vieillit vite, et qui a des troubles cognitifs réels liés à ce vieillissement. Ils deviennent incompatibles avec sa détention.
Aviez-vous déjà demandé sa libération auparavant ?
Oui, plusieurs demandes avaient été formulées. Une demande avait été faite en sur ce motif médical. A l’époque, l’état de santé de Maurice Agnelet n’était pas durablement incompatible avec la détention. Mais cinq ans après, la situation a évolué. On se retrouve avec une incompatibilité évidente, si ce n’est à court terme, en tout cas à moyen et long terme. Son état de santé ne s’améliorera pas dans les années à venir...
Un octogénaire en prison, c’était un cas particulier... lié à la particularité de cette affaire ?
Certainement. Il y a des personnes âgées en prison. Toute la question est de savoir comment on traite nos aînés ou des personnes avec de lourdes pathologies face à l’épreuve de la détention. A mon sens, cette décision respecte la dignité de Maurice Agnelet, mais aussi de l’institution [pénitentiaire].
Comment a-t-il réagi ?
C’est un vieux monsieur, un peu perdu, diminué. Evidemment, il adhérait à cette requête de suspension de peine. Mais, aujourd’hui, il a une certaine passivité face aux événements.
Lors du dernier procès il a parfois surjoué sa fatigue. N’est-ce pas le cas cette encore ?
Non. Des éléments techniques, objectifs, viennent prouver cette sénilité précoce.
Comment se sont passées ces six dernières années ?
Il s’est effacé au fur et à mesure. Il a vécu dans un grand isolement. A son âge, la vie en détention est très
compliquée...
Quand sortira-t-il ?
Nous n’avons pas de date. On l’a prévenu que cela pourrait prendre un peu de temps. Pour l’instant, il est encore au centre [de rétention] de Caen. Les modalités de sa libération seront discutées ultérieurement, compte tenu de la crise du Covid et de la particularité de ce dossier. Ce ne sera pas une sortie sèche. Il a besoin d’un accompagnement, que l’on va mettre en place progressivement.
Maurice Agnelet va être libre, mais il reste reconnu coupable de meurtre...
On ne peut plus voir les choses sous cet angle-là. Aujourd’hui, on est dans la phase d’aménagement de peine. On n’est plus du tout dans des considérations de culpabilité ou d’innocence.
Est-ce la fin de l’affaire Agnelet ?
Je ne peux pas répondre à cette question... La justice a pris une décision digne, qui respecte la dignité de Maurice Agnelet. Elle doit être saluée à ce titre, quelle que soit la condamnation prononcée à son encontre, quels que soient les faits qu’on lui a reprochés.