Faible mobilisation mais forte colère
Rentrée syndicale sous Covid-19 hier avec des rassemblements et cortèges masqués dans l’Hexagone à l’appel de la CGT, Solidaires et FSU
Plusieurs cortèges masqués, Covid oblige, ont ouvert la rentrée syndicale hier à Paris, Marseille, Nantes, Rennes ou Bordeaux à l’appel de la CGT, de Solidaires et de la FSU, contre les suppressions d’emplois et pour des hausses de salaires, au moment où se multiplient restructurations et plans sociaux : de l’enseigne d’ameublement Alinéa en passant par Nokia, BFMTV/RMC ou encore Auchan et tout récemment Bridgestone (1).
A Paris, 10 000 personnes selon les organisateurs ont manifesté dans le calme, masquées et très encadrées par les forces de police, de la place de la République à Nation.
« Il y a beaucoup de colère et en même temps le climat est anxiogène », a jugé le leader de la CGT Philippe Martinez, en tête du cortège, portant un masque blanc siglé CGT. « Les Amish en colère sont dans la rue » proclamait une pancarte, allusion à la pique d’Emmanuel Macron vis-àvis des demandes écologistes et de la gauche de moratoire sur la 5G.
« Vous avez vu le nombre de groupes qui annoncent des suppressions d’emploi ? La crise sanitaire, elle a bon dos. Auchan, ils n’ont pas arrêté de travailler pendant le confinement et là, ils virent 1 500 personnes », a-t-il ajouté.
Pour Eric Beynel (Solidaires) « le nouveau gouvernement continue de promouvoir la théorie du ruissellement en aidant les plus forts, les entreprises. On n’est pas dans le monde d’après. Une riposte est nécessaire ». Benoît Teste de la FSU reconnaît qu’il est difficile de mobiliser dans l’éducation « parce que l’heure est aux préoccupations locales d’urgence, les gens ont la tête dans le guidon aujourd’hui ». Ployant sous les contraintes sanitaires, « en cette rentrée, les gens sont déjà fatigués ». Des jeunes et étudiants étaient présents en nombre dans le cortège parisien, à l’appel des organisations de jeunesse Fidl, MNL, Unef et UNL. « Depuis juillet, nous avons noté 650 cas [étudiants, ndlr] sans affectation à l’Université de Nanterre », dénonce Victor Mendez (Unef) étudiant à Paris 10 Nanterre.
A Toulouse dans la matinée, la CGT recensait 3 000 manifestants (1 400 selon la police). Ils étaient un millier (selon la police) à Marseille, entre 2 000 (police) et 4 000 (CGT) à Lyon, 850 (police) à 1 500-2 000 à Bordeaux ,650 à1500à Saint-Etienne...
« Pas grand-chose a changé »
Caroline Arens, 49 ans, aidesoignante à Villefranche-surSaône, déçue des mesures gouvernementales, a manifesté à Lyon, « déçue » par la prime reçue : « Un pansement sur les cicatrices. » « Malgré toutes les annonces qui ont été faites, malgré l’élan de soutien qu’on a vu pendant le confinement, la réalité nous a rattrapés, il n’y a pas grand-chose qui a changé. »
A Bordeaux, où 850 personnes défilaient selon la préfecture, Lionel Gaillard, salarié chez GFT à Blanquefort, que Ford vient de quitter, est amer : « Ford s’est cassé par la petite porte [fin août] et nous sommes inquiets pour la continuité de l’entreprise », explique-t-il. A Rennes, on notait dans le cortège la présence de militants FO, dont le syndicat n’appelait pourtant pas à manifester au niveau national.
Parmi les autres revendications : hausses de salaires, abandon « définitif » des réformes des retraites et de l’assurance chômage, réduction du temps de travail « sans perte de salaire », augmentation du Smic, etc. L’interdiction de rassemblement de plus de 5 000 personnes reste en vigueur pour éviter la propagation du virus mais les autorités ont jusqu’à présent fermé les yeux sur les dépassements.
1. Hier soir, on apprenait que les ministres Elisabeth Borne (Travail) et Agnès PannierRunacher (Industrie) se rendraient lundi après-midi à Béthune pour une réunion de travail avec les syndicats et les élus locaux, dont le président du Conseil régional des Hauts-de-France, Xavier Bertrand.