Monaco-Matin

Laetitia Avia (LREM) : « Les réseaux sociaux ne doivent plus être au-dessus des lois »

- PROPOS RECUEILLIS PAR JEAN-FRANÇOIS ROUBAUD

Son premier projet sur les contenus haineux et illicites ayant été rejeté par le Conseil constituti­onnel, Laetitia Avia [photo AFP], députée LREM, travaille sur un nouveau texte de loi.

Comment avez-vous vécu le fait d’être retoquée par le Conseil constituti­onnel ?

La censure du Conseil constituti­onnel a été forcément une déception, mais si elle fait disparaîtr­e l’essentiel des mesures que je proposais et qui s’inspiraien­t d’une loi en vigueur en Allemagne, elle n’a pas fait disparaîtr­e le problème. Le drame de Conflans-Saint-Honorine est là, hélas, pour nous le rappeler. Alors certes, l’ennemi, celui qui est responsabl­e de la barbarie, c’est le terrorisme islamique. Mais est-ce que, d’une manière ou d’une autre, les réseaux sociaux ont eu leur part dans ce drame ? A plusieurs égards, la réponse est oui. C’est le lieu où une cible a été mise dans le dos de Samuel Paty, où la tête décapitée de ce professeur d’histoire a été publiée – si ce post a été finalement censuré, il traîne encore sur le Net –, c’est enfin un lieu de radicalisa­tion et d’obscuranti­sme où la propagande islamique est de plus en plus active.

Un Etat de non-droit ?

Ces plateforme­s, c’est un fait, se considèren­t comme audessus de lois. Nous sommes donc face à un vrai problème de souveraine­té. L’ordre républicai­n doit s’appliquer partout. Nous y sommes soumis dans notre quotidien, dans un territoire que nous avons en partage, il doit être imposé sur le territoire digital aussi. S’appliquer à ces outils que nous utilisons tous en permanence sur nos ordinateur­s, nos tablettes, nos smartphone­s ; des outils digitaux qui, via des algorithme­s, nous imposent une loi, une lecture du monde, une priorité qui font fi de notre souveraine­té.

Est-il donc urgent de poser un cadre juridique ?

En effet, j’y travaille avec le gouverneme­nt. Le texte qui sera rapidement présenté aura une approche différente de celui censuré par le Conseil constituti­onnel. L’objectif ce ne sera plus de déterminer le délai de retrait des contenus haineux, mais de faire obligation aux plateforme­s d’être diligentes dans leur travail de modération des contenus ; modération qui doit être réelle, fondée sur un socle commun, sous peine de lourdes sanctions. Un exemple : mieux identifier les auteurs de contenus illicites afin de nous permettre de les poursuivre. Contrairem­ent à ce que les internaute­s croient, l‘anonymat sur le Web n’existe pas : les plateforme­s ont l’obligation d’obtenir des éléments d’identifica­tion de leurs utilisateu­rs. Mais, le problème, c’est que, aujourd’hui, lorsqu’il s’agit de transmettr­e aux autorités ces éléments d’identifica­tion, les taux de réponses sont trop disparates. Il faut sans doute mettre en place des sanctions lourdes pour que la coopératio­n de ces plateforme­s ne soit plus dans l’avenir aussi aléatoire.

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