Au croisement des courages
C’était il y a quelques années déjà. Par un de ces vivifiants week-ends printaniers que les tournois de foot accaparent. Mon fils, je crois, avait marqué un but, chose rare. De ce jour-là pourtant, j’ai surtout gardé un souvenir en travers de l’estomac : à l’heure du déjeuner, le club organisateur, à deux pas de Nice, ne proposait que des sandwiches halal. C’était ça ou la diète. Le communautarisme comme chez lui.
La force des réactions qu’elle engendre est à la mesure de l’horreur de Conflans-SainteHonorine. L’agitation politique,
depuis quatre jours, n’en est pas moins agaçante, s’agissant d’un danger que nul n’est censé découvrir. Les déclarations – et les premières décisions – pleuvent comme à Gravelotte.
Comme si l’on tombait des nues.
Or, si nous avons gagné des batailles extérieures contre le califat, qui ont réduit les attentats structurés « au profit » de fêlés solitaires, la compromission s’est nourrie de lâchetés intérieures.
Il y a cinq ans encore, beaucoup ricanaient
grassement quand Christian Estrosi parlait de « cinquième colonne islamiste ».
La bataille contre l’islamisme se joue cependant bel et bien
« Les victimocrates ont assimilé la laïcité à une islamophobie crasse et indigne. »
à domicile, lorsque % des musulmans de moins de ans pensent que la foi met à sa botte les lois de la République. Ce score est le produit de décennies d’inertie, confortées par
les « victimocrates », comme les nomme l’ancien ministre Claude Malhuret, peu suspect d’intolérance. A force de crier à la stigmatisation, ils ont assimilé à une islamophobie crasse et indigne ce qui n’était qu’une laïcité ombrageuse. Il est rude de le formuler ainsi, mais l’exécution de Samuel Paty, en élevant la monstruosité d’un cran, fait vaciller les consciences. Visiblement, nous sommes à un moment de bascule. Si la bataille de la laïcité peut être gagnée, c’est sans doute maintenant ou jamais. Plus utile encore que les outils législatifs à venir, un état d’esprit se fait jour. Le courage est en route. La diffusion prochaine de livres de caricatures dans les lycées en est une expression, parmi d’autres. Mais ce courage, pour être complet, va devoir être partagé par les musulmans qui sont, eux aussi, les victimes des fanatiques. Je rêve que tous les imams de France les invitent à se rassembler et à manifester, partout dans le pays, leur attachement aux valeurs républicaines. Ce serait une formidable manière de tordre le cou aux statistiques qui fâchent.