Vésubie : reconstruction entre le coeur et la raison
À Roquebillière, les élus ont évoqué avec la Métropole et le Département l’avenir de leurs villages et l’épineux et douloureux dossier des reconstructions
Où, quoi et comment reconstruire ? Où placer le curseur entre raison et coeur ? Le débat, à peine posé, suscite déjà des réactions épidermiques et enflammées dans les vallées sinistrées par le passage de la tempête le 2 octobre. Tous le savent : les travaux colossaux ne pourront être entrepris qu’après de minutieuses et longues études des lits des rivières et des vallons, fort de la terrible expérience Alex. Et tous l’ont aussi compris : quelques ouvrages et certaines habitations rayés de la carte ou endommagés ne pourront jamais être reconstruits au même endroit. Un crève-coeur pour les élus et pour les habitants qui redoutent la mort à petit feu de leurs villages.
« Décider en fonction de la réalité ! »
À l’occasion d’une tournée des communes meurtries par la « bombe Alex » (Nice-Matin d’hier), Christian Estrosi a évoqué, sans gants, cette indispensable reconstruction des vallées lors d’une réunion en mairie de Roquebillière. « Il faut reconstruire, faire revenir les activités économiques », a lancé le président de la métropole Nice-Côte d’Azur, devant Gérard Manfredi, maire de Roquebillière, Loetitia Loré, de Venanson, et Ivan Mottet, le premier magistrat de SaintMartin-Vésubie.
Puis le maire de Nice a lancé : « Ne pas reconstruire à l’identique, ne pas tout reconstruire, il va falloir l’envisager. » Bâtir durable, en sécurité. Reconstruire, oui, pour que vivent les villages, mais pas partout… « Il y a des lieux où l’on devra se battre », admet, de son côté, le conseiller départemental Éric Ciotti. Pour d’autres, il faudra se résigner, suivre les résultats d’études pointues et concéder que la reconstruction sera impossible. Ce qu’a déjà du mal à entendre Gérard Manfredi : «Je voudrais votre aide pour être entendu au niveau de l’État sur les hypothèses de ce qui sera constructible ou ce qui ne le sera pas. Je voudrais que l’on ne décide pas en fonction de dogmes mais de la réalité ! Il faudra réétudier au cas par cas, tronçon par tronçon. » Silence…
« Être raisonnable même si c’est impopulaire »
« Je comprends la position du maire, tempère Christian Estrosi. Mais après ce qui s’est passé, on a une exigence de vertu et pas de défendre l’indéfendable. On accompagnera au cas par cas par des expertises mais ne donnons pas l’impression que nous allons défendre des reconstructions indéfendables. » Et de bombarder : «Ondoit être raisonnable, même si ça doit être impopulaire ». Éric Ciotti prévient : « Ce que l’on a vécu dans les vallées va élever tous les critères de protection. » Et Ladislas Polski, le maire de La Trinité chargé des risques naturels majeurs à la Métropole, de temporiser : « il faut entendre le mot dogme. Dans les décisions, il faudra impérativement mettre du rationnel et de la connaissance. » Des notions difficiles à intégrer lorsque le coeur et les tripes s’en mêlent…