Monaco-Matin

Aux assises, la leçon de vie de la famille de Margaux

Les proches de Margaux Mari, morte étranglée par son compagnon à La Trinité, sont venus dire hier à la cour et aux jurés combien ce drame était le paroxysme d’un processus d’emprise

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr (*) Les prénoms des enfants ont été modifiés.

Mohamed a tué Margaux parce qu’elle était l’objet de son obsession. Quand l’objet ne fonctionne pas comme on veut, on le casse et on le met à la poubelle... comme ma soeur. » Bertrand est le frère de Margaux. Le président Catherine Bonnici vient de l’inviter d’une voix douce à déposer.

Le 2 juin 2017, vers 2 heures du matin, après des années de violences physiques et psychologi­ques, Margaux a été étranglée par Mohamed Hmaad. Leurs deux enfants de 5 et 6 ans, ont assisté en partie au crime (lire par ailleurs). Bertrand, 36 ans, attend depuis trois ans et demi ce procès. Il s’y est préparé malgré un chagrin indicible et livre un récit aussi sobre que poignant du drame qui a anéanti sa famille. « Tant que Margaux restait sous son emprise, il lui octroyait le droit de survivre. Quand elle a voulu déployer ses ailes, il l’a tuée. [...] Elle est morte dans l’état de terreur que vous imaginez sans savoir ce qui allait arriver aux enfants. »

Les pompiers ont découvert la jeune femme la tête enserrée dans un sac-poubelle noué à double tour. Enseignant à l’étranger au moment du meurtre, Bertrand a été contraint de rentrer en France pour prendre en charge son neveu et de sa nièce. Il a sacrifié sa carrière, mis en péril son couple, pour élever « deux enfants incroyable­s, très intéressan­ts qui vont bien. »

« Toute sa vie, elle cherchera sa mère du regard »

Accroché à la barre, Bertrand raconte avec émotion la rentrée en CP d’Alissa (*), deux mois après la tragédie : « C’est le jour où les parents prennent des photos, donnent un dernier bisou. Alissa, cartable sur le dos est assise toute seule à regarder les autres parents. Elle cherche sa mère du regard. Toute sa vie, si elle est diplômée, si elle se marie, si elle a des enfants..., elle cherchera sa mère du regard. »

La Cour et les jurés écoutent dans un silence recueilli.

Dans le box, l’accusé n’ose croiser le regard de Bertrand Mari qui poursuit avec éloquence : «Le 1er juin, j’étais le plus heureux du monde, je faisais le métier de mes rêves, on venait d’avoir notre fille, elle avait six mois. Le 2 juin, au réveil, tout ça s’effondre. Ma soeur est assassinée. Mohamed est en fuite. Mes parents ont peur... Ma fille ne connaîtra jamais son papa heureux. »

Aujourd’hui, Bertrand élève trois enfants. Il a été désigné comme « tiers digne de confiance » par un juge aux affaires familiales. Tel un avocat rompu aux plaidoirie­s, il rappelle que Mohamed Hmaad dispose toujours de l’autorité parentale sur ses deux enfants. « Estce juste que je doive demander l’autorisati­on à l’assassin de ma soeur si je peux emmener ses enfants en vacances à l’étranger ? » Bertrand veut que la cour laisse à Alissa et Ilyes le droit de décider quand ils voudront voir leur père et non l’inverse. Après Bertrand, c’est Paul Mari, 78 ans, ancien maire de Coarraze, qui vient donner une leçon de vie. Il se définit comme « un humaniste, citoyen du monde » . Ilne pourra jamais excuser le crime atroce qui lui a arraché sa fille. Il vient le dire sans haine, sans éclat de voix : « Que reste-t-il pour un vieil homme comme moi ? Que mes petits enfants puissent aller vers une vie sereine, pleine d’affection et d’amour. Ma famille en a à revendre et les tantes [les soeurs de l’accusé Ndlr] en ont aussi. » Deux grands hommes viennent de se succéder à la barre. Dans le box, l’accusé, recroquevi­llé, plie de plus en plus sous le poids de son crime. Il sera fixé sur son sort cet après-midi.

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(DR) Margaux venait de fêter ses  ans. Elle était mère de deux enfants.

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